Sortie du 6 juin 2024 par Dyn’s Tête de Rigaud (1907m) et La Madeleine (1693m) au départ de Rubi
Contempler l'indicible beauté des lieux et arpenter l'éternité comme seuls objectifs...
Itinéraire, carte // Fiche topo
Topo de référence
Pour découvrir la carte, l'itinéraire et les infos détaillées, veuillez consulter le topo de référence
Conditions météo
Parfaites !
Récit de la sortie
Si la montée fut similaire au topo, la descente ne s’est pas déroulée en aller-retour. Du sommet de la Tête de Rigaud, j’ai enchaîné le Dôme du Barrot par le collet des Mées, puis effectué une grande boucle par le collet de la Vigude et les vallons de la Salvanière et de Ciavanelle. (1700m D+, 20km)
Le sentier de retour entre le collet de la Vigude (balise 117) et le Pas (balise 116) étant interdit par arrêté municipal est la raison pour laquelle je n’ai pas écrit de nouveau topo, me contentant de relater cette escapade sous forme de sortie...
5h20 du matin, alors que les premières lueurs de l’aube prennent place dans le ciel, j’entame cette nouvelle aventure fort prometteuse à l’instar de ce minuscule hameau de départ, bien nommé Rubi. Je récupère le sentier derrière la petite chapelle et monte dans le hameau. Dans une pénombre encore bien marquée, je me demande quelques fois si je ne me suis pas trompé de chemin, tant le sentier est envahi par de grandes herbes folles. Plus haut, après avoir dépassé les dernières maisons, il se poursuit dans le flanc de la montagne vers le collet de Tira où la vue s’ouvre magistralement sur les gorges supérieures du Cians.
C’est à partir de là que le cheminement remonte une longue crête s’étirant jusqu’au Cerisier. Les premiers rayons ne tardent pas à illuminer les falaises de la Montagne de Mairola qui se teintent d’abord timidement, puis s’enflamment plus franchement. Quelques minute plus tard, le soleil sort de la ligne d’horizon, me voilà baigné de lumières et de couleurs chaleureuses, prémices d’une journée fabuleuse...
Tout juste avant de déboucher au col sous le Cerisier, le bout de la Tête de Rigaud apparaît comme un mirage... Elle n’a pas la forme d’une montagne de granite effilée, ne ressemble ni à une citadelle calcaire, non... on dirait un temple d’une civilisation disparue telle une pyramide maya, laquelle on gravirait pour s’élever dans les cieux... Une citation me vient en tête et tombe à point nommé : Les montagnes ne sont pas des stades où je cherche à satisfaire mon ambition, mais les cathédrales où je pratique ma religion... Loin de moi de cocher pour cocher, accumuler des sommets comme des médailles... J’y vais pour vivre quelque chose... Toucher l’insaisissable...
C’est pile ce point de vue qui me faisait rêver, la Madeleine et la Tête de Rigaud en enfilade... J’imaginais le tableau de maître avec la palette des belles couleurs matinales... Ça y est, j’y suis... C’est là que le songe devient réalité... C’est là que le vermeil devient merveille...
La vie : un équilibre entre rêver sa vie et vivre ses rêves.
Je poursuis dans le flanc de la Madeleine pour me présenter au pied de la Tête de Rigaud. Ici, comme souvent en montagne, c’est la beauté du cheminement pour gravir le sommet qui importe plus que le sommet lui-même. Si autant l’audace de la ligne dénichée rentre souvent en jeu - question de style ! Là, on se laisse flâner au gré du relief bigarré si singulier. La roche écarlate comme clou du spectacle.
Je tire vers l’ancienne cabane et son enclos en pierre, bifurque rapidement dans un ravin de pélites rouges contrastant avec le vert fluorescent des touffes d’herbes et le blanc cassé des blocs de quartzite. J’avance peu ou prou en diagonale vers le versant oriental, remonte jusqu’à la ceinture rocheuse, me faufile dans une faiblesse, grimpe quelques gradins. Je suis accueilli par des brebis stupéfaites de voir quelqu’un débouler par là ! Les patous ne sont pas très loin, je préfère ne pas m’attarder. J’entame aussitôt la descente droit dans la pente en visant la piste pastorale menant au collet des Mées. Deuxième chapitre : la traversée vers le Dôme de Barrot !
Le tapis rouge est déroulé. L’une des plus belles pistes que j’ai pu emprunter ! La suite est tout à fait logique, il faut remonter la crête sud-est de la montagne d’Auvare, rejoindre l’épaule cotée 1977, puis recouper l’itinéraire balisé menant au Dôme de Barrot. Me revoilà au sommet trois jours après l’avoir gravi en venant de la Tête de la Colombière. Et quelle vue encore une fois ! Quelques nuages en moins !
Pas de risque d’orage aujourd’hui, je peux profiter allégrement du paysage, et dans une solitude toute propice, m’abandonner aux joies de la contemplation.
Puis, vient le moment de se remettre en marche. Le retour s’annonce long...
De retour à l’épaule au niveau de la balise, je plonge dans le versant sud de la montagne, encore une fois bien nommé le Contan. Les affleurements de pélites ne peuvent que dessiner un sourire sur un visage, fouler ces terres rouges est un véritable enchantement.
C’est après avoir évolué de corniches en corniches dans le flanc de la crête d’Arbanal que je parviens au collet de la Vigude, étape principale précédant la descente par les vallons de la Salvanière et de Ciavanelle.
À ma grande surprise, je découvre un arrêté municipal placardé sur le poteau directionnel. Une interdiction en vigueur concernant la praticabilité du sentier entre les balises 217 et 216. C’est mon itinéraire ! Que faire ? Un grand détour par la baisse de la Nouguière ? J’en serais capable mais pas vraiment la motivation ! J’imagine que l’arrêté porte sur un effondrement d’une courte section traversant un raide ravin laissée en l’état ou trop compliquée à retaper. Je devrais pouvoir m’en sortir, je ne suis pas né de la dernière pluie !
Je fais fi de cette interdiction et m’engage sur le sentier plongeant dans le vallon de la Salvanière. Dans une société qui se doit de protéger son prochain, on se doit d’avertir d’un danger, mais doit-on toujours se borner à interdire dès qu’il se présente ? Dissertation, vous avez deux heures ! Ne devrait-on pas laisser l’individu juger en toute responsabilité et en fonction de ses capacités ? On dirait que ce n’est pas le choix d’une société qui nie l’évidence et fait fi de la connaissance de soi... « Ce n’est pas un signe de bonne santé mentale que d’être bien adapté à une société malade » disait Jiddu Krishnamurti...
N’étant plus (ou presque plus) fréquenté, le sentier se révèle bien discret dans cette première partie de la descente. Une ambiance sauvage toute particulière opère en ces lieux délaissés... Avec un petit pincement à l’estomac quant à l’éventualité de se retrouver bloqué et de faire demi-tour à tout instant... Quelle aventure !
C’est finalement entre la passerelle et Tiechero que le sentier s’insinuant dans un raide dévers, où l’exposition n’est pas du tout à prendre à la légère, est fortement dégradé. Même les renforts ont sauté ! Avec une extrême prudence, je franchis ce mauvais pas, puis poursuis avec soulagement... Celui de ne pas revenir sur ses pas ou de tenter un contournement rocambolesque...
La jonction avec la balise 216 juste avant le Pas conforte le fait que je sois sorti définitivement d’affaire. Le retour s’effectue sereinement mais ce n’est pas la fin des surprises... Les derniers kilomètres jusqu’à Rubi s’effectuent sur une large piste dont les travaux d’aménagement sont très récents. Je dois même enjamber une chaîne tirée en travers du chemin pour revenir dans la rue principale du hameau. Il semble que la balise 215 n’existe plus... Impossible de conseiller cet itinéraire avec ces différents aléas, mais ce fut une escapade dantesque, haute en couleur, forte en émotion, pour cette dernière virée en terres rouges. Un sacré coup de cœur... marqué au fer rouge... c’est le cas de le dire !
Photos
Auteur : Dyn’s
Avis et commentaires
Tu as pris ton temps pour la publier celle-ci ! 🙂
Le rouge est encore plus éclatant avec cette lumière matinale.
J’aime beaucoup l’image du "tapis rouge déroulé" entre les deux sommets.
Et merci pour la citation, quel honneur !
J’ai aussi reconnu du Michel dans le texte ;)
Très heureux que ce topo resté longtemps anodin suscite de l’intérêt. Belle variante !
Suis en phase avec ces citations et je pense qu’il nous reste la philo et les escapades sauvages pour résister aux marasmes de notre époque… merci pour le crédit.
Autres sorties
Retrouvez les récits et photos de randonneurs ayant déjà parcouru cet itinéraire.