Sortie du 12 avril 2024 par François Lannes Ferme du Désert (ruines) (1282m) du col de Menée

Il y avait encore trop de neige... Alors j'ai fait autre chose.

Itinéraire, carte // Fiche topo

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Conditions météo

Très beau temps : ciel bleu.
Peu de vent.
Température plus chaude que la moyenne d’un mi-avril

Récit de la sortie

Nettoyage du sentier de la Ferme du Désert
.

En ce qui me concerne, l’hiver est une saison de faible activité montagnarde.
En effet, j’ai remisé les skis de randonnée il y a plus de trente ans, considérant que la pratique qu’il me plaisait de faire était trop dangereuse avec ces avalanches dont la maîtrise est bien aléatoire. Et les raquettes à neige – elles – sont restées dans leur enveloppe d’origine, sans que – je crois – elles n’aient jamais servi.
Et voilà : quand il y a de la neige, je ne fais plus rien !

Les sentiers de chamois, les parcours un peu acrobatiques, ceux qui me plaisent tant, sont impraticables dès que deux petits centimètres de neige les recouvrent. Et, à partir de la fin novembre – voire plus tôt parfois – jusqu’au mois de mai environ, je dois trouver des idées de substitution pour déclencher de nouvelles sorties.

Ces cinq mois à couvrir sont bien longs…
Et la créativité fait parfois défaut.
Ces dernières semaines, je manquais de motivation.

C’est là que, tout d’un coup, me revint en mémoire le versant nord de la montagne de Belle Motte : le Diois. Il y a dans ce versant une barre de falaises dans laquelle se glisse une vague vire, repérée il y a deux ans, et qui justifierait d’aller vérifier si elle « passe ». D’autant que l’altitude moyenne de ce sommet permet de penser que la neige y aura déjà fondu.
D’un coup, la motivation revient. Le paquetage est rapidement fait. C’est parti !

Du col de Menée où la voiture est stationnée, il n’est pas possible de voir le versant de Belle Motte. Qu’à cela ne tienne, d’ici quelques hectomètres, une ouverture dans la végétation fournira le panorama nécessaire à bien voir l’ensemble et, d’un coup de jumelles, à définir le détail du cheminement possible.
J’avance sur la piste pastorale qui monte au col de Jiboui, d’un pas gaillard (enfin, c’est ce dont je me persuade…).

À l’endroit du fameux panorama : patatras !
La neige !
Elle est présente très bas dans le versant !
C’est là que je réalise mon erreur de raisonnement, car il s’agit d’un versant nord. Et qu’ici la neige descend jusqu’aux environs des 1600 m d’altitude ; la vire supposée est encore garnie de poudre blanche. Il aurait dû m’apparaître logique que, actuellement et dans un versant NORD, la neige aurait des reliquats jusque si bas. Des reliquats hélas trop importants !
Le programme de la sortie est à changer – forcément – car il n’est pas question d’aller me fourvoyer dans cette semi-forêt, raide qui plus est, s’il y a autant de neige. Cela en deviendrait une affreuse galère, sans compter que je n’ai pas les chaussures adaptées.

Le changement de programme est vite trouvé.
Initialement, j’avais prévu de donner – en passant – un petit coup de nettoyage au sentier qui mène à la Ferme du Désert, pour faire suite aux efforts de l’année dernière. Eh bien, ce nettoyage sera maintenant plus important que prévu et constituera le point principal de la journée !
Finalement, ce nouveau programme n’est pas pour me déplaire car je l’aime bien ce sentier oublié, enseveli qu’il fut lors de la construction de la piste pastorale.

En arrivant à l’endroit des travaux de pioche faits l’automne dernier, je constate avec soulagement qu’ils sont restés en bon état. Ils ont bien passé l’hiver et ces quinze mètres de descente en diagonale, dans le talus de la piste, se franchissent confortablement. Rien n’est à reprendre ici.
Continuons le sentier.

Je suis étonné du nombre de branches et de pierres que l’hiver a fait tomber ou rouler sur la trace. C’est vraiment surprenant. Avec des coups appliqués du bâton de randonnée, je repousse les branches dans le travers ; mais pour les pierres, il faut se baisser, et ce geste répété est une fatigue à prendre en compte.

Voici l’endroit critique.
Ici deux bosquets d’arbustes et d’arbres de petit diamètre ont poussé pile sur le milieu du sentier. La trace en est quasiment bloquée sur une vingtaine de mètres de longueur. Au mois de mai dernier, j’avais dégagé le côté amont de la trace mais cela s’était avéré peu commode à l’usage, obligeant à un parcours type montagne russe finalement désagréable.
En octobre suivant, j’avais repéré la trace faite par les bêtes contournant l’obstacle par l’aval. Cela semblait plus astucieux, bien que peu confortable pour les pieds car de surface en biais : chevilles souples recommandées. Mais c’était quand même devenu le passage choisi.

Aujourd’hui, ayant du temps devant moi, je décide de faire un boulot plus sérieux, et de restituer la trace sur son cheminement originel : droit devant !
C’est là une tâche d’une autre ampleur. Il faut scier des branches, pousser des cailloux, enlever un tronc vermoulu mais encore bien lourd, dégager des monceaux de feuilles mortes, en ne se piquant pas aux ronces nombreuses ici. Rien que cela !

Un bon moment plus tard (je n’ai pas regardé la montre…) le « nouveau » cheminement est fini. Il est loin d’être celui de l’origine, bien loin. Il faudrait pour cela encore dégager le deuxième bosquet d’arbustes, enlever la terre glissée du haut et encombrant la zone… Bref, il faudrait y passer le quintuple de temps et d’efforts. Je n’en ai pas le courage aujourd’hui.

Ayant terminé ce que je voulais faire, je rassemble mes affaires : scie, sécateur, lunettes, gants, casque, chemise, pour les remettre dans le sac.
Tiens, le piolet, où est-il ?
Je l’ai posé au sol je ne sais plus quand ; il doit être par là. Il n’y a qu’à fouiller un peu, et il va ressortir.
Un premier passage en arrière, mais je ne le vois pas. Retour vers l’avant : toujours pas… ???
Bizarre.
Je pense à vérifier sur la trace des bêtes, en dessous, des fois qu’il ait glissé jusque-là…
Trouve pas non plus !
Là, le mystère s’épaissit.
Je reprends mes recherches – bis repetita – sur les mêmes endroits, mais elles sont toujours infructueuses…
La peur me frappe : où peut bien s’être caché cet outil ??

Ici, je me dois de faire un aparté pour expliquer le pourquoi de l’attachement à ce piolet.
C’est en fait un marteau-piolet.
Je m’en suis équipé en 2012 pour remplacer le vieux piolet de bois datant de 1973 qui était trop lourd et insuffisamment précis pour les acrobaties sur les vires. Il me fallait aussi un outil pour taper les spits en place quand une pose d’assurance devenait nécessaire.
Ce piolet, donc, m’a accompagné dans toutes les virées « spéciales » parmi lesquelles il y a le versant nord-est du Chamousset, la vire Miracle du Moucherotte, et puis aussi la directe ouest de la pointe 2351 à la montagne de Faraut. Ceci n’étant que les premiers souvenirs qui me reviennent en mémoire, ceux qui sont les plus forts mais qui sont loin d’être les seuls.

Il existe, entre lui et moi, un lien fort. Un lien de confiance, un lien qui fait que, quand le l’ai dans l’une de mes mains, je me sens mieux sûr de mon affaire et que j’ose des choses que sans lui je ne pourrais pas. Il a su – un jour – si bien se planter dans une motte d’herbes que j’ai pu me tirer sur lui – d’un bras – et me sortir d’un mauvais pas où mon impétuosité m’avait jeté…
Bref, ce piolet : j’y tiens beaucoup…
Il m’est précieux.
Très.

Retour au tracas du jour.
Ce piolet, il ne peut pas être perdu !
Suite à un troisième passage sur le chantier, toujours négatif, je me dis qu’il faut alors employer les grands moyens : il faut retourner – à savoir : mettre en l’air – toutes ces feuilles, toutes ces pierres et tous ces troncs que, dans l’heure précédente, j’ai amoureusement positionnés afin de constituer un parapet sur l’aval de la trace ; il faut oui tout chambarder afin de vérifier si le piolet n’est pas dessous !
Avec regret, mais aussi avec l’énergie du désespoir, je retourne cul-par-dessus-tête tout le travail fait précédemment et envoie « bouler » dans la pente l’ensemble de ces matériaux.

Quelle ne fut pas ma joie, lorsqu’enfin l’éclat brillant gris métallique du manche apparut de dessous quelques feuilles ! Je retrouvais enfin mon compagnon de tant de souvenirs.
Dans un mouvement naïf et enfantin je le pressais contre moi…

.

Plus loin sur le sentier, des genêts envahissent la trace.
Le sécateur entre en action, mais la crainte de tomber sur un serpent me fait prendre du recul et me fait choisir de taper les tiges avec le bâton et de faire du bruit dans l’idée de faire fuir cet éventuel habitant des lieux.
Je ne resterai pas très longtemps sur ce chantier-là.

Plus loin encore, c’est la forêt de hêtres.
Je n’en reviens toujours pas de voir combien de branches sont tombées au sol, des suites de l’hiver. Et le travail de déblaiement est loin d’être anodin. D’un coup de bâton ajusté, encore, je projette ces bois vers le talus aval.
Dans un repli du versant, un petit vallon, je suis surpris également de voir le lit d’un ruisseau (à sec aujourd’hui ainsi que les précédentes fois) avoir été complètement ravagé par une crue subie. Les pierres du socle sont mises à nu et le tapis de feuilles a été projeté loin sur les bordures. Incroyable ! Un épisode sérieux est passé par là… qui explique certainement aussi toutes ces branches au sol…

Une fois sorti de la forêt, ce sont les prairies ouvertes de la Ferme du Désert.
Qu’elles sont accueillantes !
Et puis, ce printemps naissant, déjà un peu vert, à l’herbe encore rase, donne toute la beauté possible à ces lieux !

Descendant la prairie en direction de la ferme, je suis surpris de ne pas revoir ces « taches » bizarres, dans les herbes, constituées par les tôles de la toitures, arrachées à la charpente par des vents violents, vents qui les avaient ensuite dispersées dans la clairière à plusieurs dizaines de mètres du bâtiment…
Quelqu’un les aurait-il enlevées, ces tôles ?
En approchant de la ruine, effectivement, je vois un tas de choses informes. Vu de plus près je reconnais là les fameuses tôles, regroupées et tordues, rassemblées avec d’autres objets hétéroclites telles des roues en bois de charrettes et autres pièces métalliques. Quelques mètres plus loin, un second tas est, lui, constitué de pièces de bois de toutes dimensions, dont des poutres…

Des ouvriers sont venus ici, l’année dernière, après le mois de mai, et ont entamé des travaux de nettoyage de cette ferme ! De fait, la zone à l’intérieur des murs – de ce qui était la partie habitation – a elle aussi été nettoyée ; et la végétation, qui avait poussé ici de façon anarchique, n’existe plus. Seules des caillasses retournées sont présentes. Deux éviers de cuisine, posés de guingois sur le sol, semblent incongrus dans ce chantier.

Du côté de l’ancienne grange, les poutres inutiles, ont été enlevées et regroupées sur le tas de bois précité.
Pour l’ancienne bergerie voutée – écroulée sur la moitié de sa surface – le sol de la partie écroulée a été nettoyé des ronces et broussailles diverses qui l’encombraient. La partie restante, toujours voutée donc, semble avoir été renforcée par des étais supplémentaires.
M’approchant un peu des voûtes, tout en restant prudent face à un possible écroulement de pierres, je constate que les deux pieds principaux de ces voûtes sont une simple pierre de taille ! Elles paraissent toutes menues face à l’énorme poids qu’elles doivent encaisser ! C’est incroyable ! De l’art roman pur jus…

Je me perds en conjectures sur le pourquoi de ces travaux.
Mais de toute évidence, ils vont continuer, vu l’engagement initial qui leur a été donné.
Voulant en savoir un peu plus, je me demandais comment les ouvriers étaient montés jusqu’ici. J’avais repéré sur la carte le tracé d’une piste venant du fond de la vallée. Il suffisait alors d’aller voir cette piste, au bas de la prairie.

En peu de pas, j’étais au bas de la prairie.
Et là, une belle piste commençait, qui descendait dans la hêtraie. Je la suivais.
Quelle ne fut pas ma surprise en constatant que cette piste venait d’être reprofilée très récemment, et d’être remise au gabarit de véhicules tout-terrain ! Je descendais plus loin encore.

Magnifiques !
Les travaux faits sur cette piste sont magnifiques !
Ils sont de l’année dernière eux aussi. Et ils sont impressionnants.
Dans un passage très raide, à flanc de roche côté gauche, et avec un bas-côté plongeant profond côté droit, un engin de terrassement a œuvré en entamant le calcaire à pleines griffes, et en coupant des racines grosses comme des gouttières, pour mettre la bonne largeur de voie. Cette portion, longue de deux cents mètres, me faisait peur car il n’y serait pas question de croisement entre deux véhicules. Quant à faire une marche arrière dans un tel endroit… ! ! ! Non ! Je crois que je refuserais de monter comme passager dans une voiture 4 x 4 sur cette piste-là.

Toujours est-il que la conclusion est évidente : vu l’engagement des travaux faits sur cette piste, il est clair que la remise en état de la Ferme du Désert va se poursuivre. Cette conclusion est pour me réjouir vraiment car, dès la première fois que j’ai vu une photo de cette ferme, dans son lieu de quiétude, j’ai eu envie de la voir en vrai.
Et dès que je l’ai vue en vrai, j’ai eu l’envie utopique qu’elle revive… !

Peut-être est-ce le cas qui se produit aujourd’hui ??
Peut-être ??
Ce qui est sûr, c’est que je reviendrai ici.
Pour le petit sentier oublié.
Et pour la Ferme du Désert.

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Randonnée réalisée le 12 avril

Dernière modification : 18 avril 2024

Auteur :

Avis et commentaires

L’homme à tout faire d’Altituderando !
Et merci à toi pour ces restaurations de sentiers oubliés....

Bonjour vermatoiz,
Oui : cantonnier déjà ; bûcheron aussi ; également balayeur....
Enfin, tout quoi !

Et bien, quelle journée, François ! On pourrait t’appeler François le Cantonnier !

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