Sortie du 5 juillet 2021 par CourtePatte Petite Séolane (2854m)
Une sortie à combler n'importe quel naturaliste. Les vues glorieuses y seront presque secondaires !
Itinéraire, carte // Fiche topo
Topo de référence
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Conditions météo
Beau. Quelques petits trains de nuages en début d’après-midi.
Récit de la sortie
J’avais deux raisons bien précises pour rendre visite à la Petite Séolane.
La première, c’était de voir d’en haut les gypses de Terre Blanche, qui m’avaient envoûtée en version automnale l’année dernière lors d’une balade absolument magique autour de la Séolane des Besses.
La seconde, c’était d’obtenir compensation pour les 25% de la vue dont j’avais été spoliée lors de ma visite à la Grande Séolane en 2019 : ce jour-là, un nuage obstiné m’avait barré tout le quart ouest de l’horizon.
Je n’attendais rien d’autre. Alors tout le reste, je l’ai pris en pleine figure.
D’abord, il y a eu les fleurs. Pourtant, depuis le temps, les floraisons montagnardes du début juillet, je suis psychologiquement préparée. Alors de deux choses l’une : soit je suis comme le Ravi de la crèche, avec une capacité d’émerveillement éternellement renouvelée, soit c’était affaire d’être au bon endroit au bon moment : toujours est-il que cette montée depuis le Laverq ne fut qu’un long déferlement de floraisons, dont l’opulence n’avait pour égal que la variété. En marées, en nappes, en taches au flanc des pelouses ; des camaïeux de roses, de mauves, de bleus, illuminés par l’exubérance des doronics et la vibration des lis orangés, soulignés par la blancheur virginale des lis de la Saint-Bruno ou celle des renoncules. Il y en avait pour toutes les tailles et tous les formats, depuis la pagode des gentianes jaunes aux nigritelles bijou (j’ai vu pas loin de dix espèces différentes d’orchidées sur cette balade) en passant par les tapis des dryades. Impossible de ne pas craquer pour quelques photos, alors même que je professe que "rien ne ressemble autant à une photo de gentiane qu’une autre photo de gentiane" et que j’en ai déjà bien assez sur mon disque dur...
Et puis il y a eu les roches. J’avais bien noté que la Grande Séolane est ceinturée de grès, rien d’étonnant donc à en rencontrer également sur cet itinéraire. Il y a un passage à flanc de pierrier, sur le GR, que j’ai bien dû mettre un quart d’heure à franchir tant les roches y étaient intéressantes. Les grès y parlent comme rarement de leur histoire aquatique, avec des rides, des bosselures, des marques de dessiccation : on dirait que le matériau s’est asséché hier. Et ce n’est pas tout ! Il suffit d’ouvrir un peu l’œil et de guetter quelque étincelle à ras de sol pour trouver des cristallisations de quartz.
Et bien sûr, pendant ce temps, toujours sous vos pieds la tranchée idyllique de la vallée du Lavercq dont les mélèzes vont laper le pied de la grande barrière de l’Estrop. Aha ! C’est donc de cette vue que j’avais été privée lors de ma visite à la Grande Séolane ! J’ai drôlement bien fait de revenir.
Comme indiqué par les deux topos sur la Petite Séolane (celui-ci et celui-là), depuis le Col de Séolane l’on est guidé par une série de cairns très bien disposés, et il y a même, lorsque le terrain s’y prête, une petite sente. Ceci rend l’ascension très confortable, et il est à peu près impossible de se perdre.
La montée au collet entre l’antécime sud et le bastion sommital se déroule au pied des grandes falaises de ce dernier, dont la verticalité écrasante confère à ce passage une ambiance impressionnante, presque menaçante, dans la solitude et les grands blocs écroulés. Lors de mon passage les névés résiduels y soufflaient une haleine glaciale, et sous l’ombre des grandes murailles l’on n’entendait que le vent et les vociférations de quelques chocards.
La suite de l’ascension, en comparaison, est un peu plus banale. Le grand couloir nord-ouest était toujours en neige, avec une consistance parfaite pour le randonneur à bâtons ; petits passages rocheux, puis sente de débris et de terre jusqu’au sommet. Là encore, on peut ouvrir l’œil pour d’éventuels cristaux de quartz semi-enterrés.
La vue du sommet est décrite dans tous les topos et toutes les sorties du secteur : vallée du Lavercq, Ubaye vers Barcelonnette, Ubaye vers Serre-Ponçon, Dévoluy, mont Ventoux, je ne fais pas la litanie. Je pique-nique en contemplant la vallée du Lavercq et je m’en imprègne si bien que... je découvrirai plus tard que je n’en ai pas pris une seule photo du sommet !
Par contre il y a les gypses que je voulais tant revoir. Terre Blanche à demi-enneigée fut l’occasion de démontrer que les gypses ne sont justement pas si blancs que ça ; mais Terre Blanche entre les langues vertes des pelouses et la grisaille des pierriers calcaires, c’est déjà un peu plus crédible. Je suis tout de même un peu frustrée, car je comprends que la meilleure vue sur Terre Blanche, ce n’est pas du sommet de la Petite Séolane que je l’aurai, mais plutôt du col de l’Ailette. Excellent prétexte pour revenir !
C’est dans le secteur des éboulis au pied du bastion sommital que j’aurai ma dernière surprise naturaliste de la sortie. J’y fais détaler une marmotte. Rien de plus banal, sauf que... On fait des marmottes à longues oreilles cette année ? Je guette et j’aperçois... une sorte de gros lapin beige à ventre pâle. Or je connais aussi bien le lièvre des plaines que le lapin de garenne : cette bestiole n’est ni l’un ni l’autre. Est-ce que ce serait ma première rencontre avec le lièvre variable ? Fabuleux : je l’avais classé au rang des animaux quasiment mythiques, ceux que je n’ai à peu près aucune chance de voir un jour ; il aura fallu que je vérifie son existence dans le secteur de Lavercq, et son apparence, avant d’oser y croire.
Je suis redescendue par les Besses puisque je mettais le cap sur Méolans. Ça m’a permis de comparer les deux itinéraires. Si celui des Besses, essentiellement boisé, doit être agréable par temps de cagnard, il est tout de même beaucoup moins riche sur le plan botanique que la montée du Lavercq à cette saison. Signalons au passage que, si le sous-bois est par endroits tapissé de framboisiers très prometteurs, il comporte également de très nombreux pieds d’aconit tue-loup.
Une sortie qui m’aura éblouie et comblée. Moi qui redoutais que cette balade souffre en comparaison de la précédente dans le secteur, je suis toute prête à y retourner encore !
Photos
Auteur : CourtePatte
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