La Cuillera (1406m) en boucle par l’arête nord-est
- Difficulté :
- Difficile
- Dénivelé :
- 400m
- Durée :
- 4h
Quand j'ai imaginé cette petite boucle sur la carte IGN, je ne savais pas combien - en si peu de minutes - je pourrais être transporté dans un univers aussi sauvage et aussi lointain. Pourtant, la civilisation était là, toute proche, juste en bas. Et je la voyais bien. Mais ici - sur son flanc et sur son fil - l'arête nord-est de la Cuillera m'a surpris, m'a inquiété aussi, m'a rasséréné enfin . Elle m'a emporté dans son monde intrigant, rude, rassurant et chaleureux. Que peut-on attendre de plus d'une randonnée ? – Auteur : François Lannes
Accès
Sur la D 1075 Grenoble -> Sisteron, passer le col de la Croix-Haute, puis Lus-la-Croix-Haute, pour arriver à Saint-Julien-en-Beauchêne. Juste avant de passer sous la voie ferrée, tourner à droite direction Montama.
Le départ de la randonnée peut se faire de 3 points différents, suivant ses préférences :
1 - Laisser la voiture au pont (peu commode) et prendre le GR de Pays "Tour du Buëch" qui commence là
2 - Aller jusqu’à Montama-Bas et laisser la voiture dans l’épingle à cheveux (peu commode aussi) pour prendre une piste forestière qui part de là
3 - Aller jusqu’à Montama-le-Haut et laisser la voiture à l’entrée du hameau (tout petit parking, bien rempli), et prendre la piste forestière qui commence à gauche des premières maisons.
Précisions sur la difficulté
90% de la randonnée se fait sur des pistes faciles à parcourir.
Les 10% restants sont hors sentier et demandent un très bon sens de l’orientation, et une capacité à détecter les traces des bêtes afin de se faciliter la tâche.
Les 100 mètres de dénivelé à faire sur l’arête proprement dite sont complètement hors trace, dans une forêt de buis et de pins mélangés. Ce parcours nécessite un bel effort physique, mais n’est pas angoissant quant au tracé à trouver : une falaise à gauche, et de raides pentes d’éboulis à droite. Faut aller droit en haut !
Photos
Les infos essentielles
- Carte IGN : TOP 25 - 3338 OT - Serres Veynes - Haut Buëch - Bochaine
- Altitude minimale : 1063 m
- Altitude maximale : 1406 m
- Distance : environ 7 km
- Horaires : comptez entre 4 et 5 h
- Balisage : Horizontal Jaune Rouge
Chargement de la carte en cours
Itinéraire
Du point de départ choisi, rejoindre le point coté 1104 m, sur la piste forestière venant de Montama-le-Haut. Continuer alors le GR de Pays vers la Grésière (point coté 1190 m).
Lorsque le GR coupe la piste à la deuxième fois, le quitter, et prendre la piste forestière vers la gauche. Aller jusqu’à l’épingle qui suit. On quitte la piste ici (1245 m).
À l’extérieur de l’épingle, repérer un gros caillou. Il marque le départ d’un vague sentier.
Ce sentier mène en quelques mètres à une crête, Faire une courte traversée à flanc pour rejoindre le premier des deux vallons de cailloutis. Les cailloutis sont surprenants par leur homogénéité de dimension, de leur petite dimension. Détecter une trace de bêtes qui file à l’horizontale dans ces cailloutis. Aller au fond du vallon.
On retrouve une courte zone boisée. Tirer un peu vers la droite pour atteindre un collu, qui donne sur le second vallon de cailloutis. Ce vallon est bien plus grand que le premier.
Aller dans son flanc droit, et détecter la trace de bêtes qui le traverse complètement, toujours à l’horizontale.
Aller tout au fond du vallon, et rejoindre l’arête nord-est de la Cuillera : une falaise rocheuse et boisée empêche d’aller plus loin (quelques pas nécessitent un bon équilibre).
Remonter cette arête au mieux possible, en tâchant de trouver les trouées dans les buis ras du sol (passage bien physique - quelques éclaircissements ont été faits à la scie à main).
100 m plus haut, on débouche dans les petites prairies du sommet de la Cuillera. Naviguer dans ces prairies pour éviter les bosquets, et rejoindre facilement le sommet 1406 m tout au bout. Profiter des nombreux panoramas.
Au sommet, une vieille clôture résiste encore un peu à l’usure du temps et du climat. La suivre vers la droite en descendant. Elle mène à la forêt, et à une magnifique piste forestière qui descend droit vers le bas jusqu’au col de Montanit.
Là on retrouve le GR de Pays. Suivre ce GR vers la droite, pour revenir à son point de départ.
Nota : il est tout à fait recommandé d’aller au sommet de la Cuillera, même sans faire la boucle par l’arête nord-est. Il suffit de monter au col de Montanit, et de prendre la piste magnifique qui part du col, sur la gauche. Cela vaut vraiment le coup. Essayez-le !
Histoire de cette sortie :
En cette fin décembre, je découvre le hameau de Baumugne. La neige tombée la veille couvre le sol d’une fine couche de blanc. Et le fond de l’air est bien frais.
Comme toujours, après avoir fait les photos des lieux proches, je sors les jumelles, et observe les lointains, ceux-là dont les détails ne peuvent se percevoir sans l’aide des lentilles grossissantes.
Dans l’axe de ce vallon, finalement devenu étroit ici, se trouve un sommet imposant, à l’allure plutôt ronde. Il m’est inconnu, car c’est la première fois que je viens dans ce bout de civilisation. « Il faudra regarder sur la carte…. ».
Le versant que propose ce sommet est vraiment raide. La forêt y est omniprésente. Tout en haut, un groupe de rochers forme bloc. Ce sont eux que je scrute de façon plus précise. Une arche rocheuse – si elle existe – ne peut se trouver que là.
Et bingo !
Dans l’image de la binoculaire, se détache une ombre sombre. Cette ombre est au pied d’une haute lame de calcaire. À tous les coups il y a là à minima un porche, et il semble de belle dimension.
Comme toujours la vision en direct n’est pas assez exacte. Et il faudra faire une photo numérique, puis la grossir au zoom de l’ordinateur pour avoir confirmation – ou non – du relief qui se découvre.
Mais, cette fois encore, le zoom ne fournira pas la réponse affirmative que j’attendais. Et malgré les yeux dilatés devant l’écran, je dois me résoudre à attendre d’aller sur place pour être enfin fixé sur la réalité géologique dont il s’agit.
Deux mois plus tard.
La raideur du versant est trop grande, et la forêt qui se trouve là n’a pas de sentier répertorié par IGN. Cela ne veut pas forcément dire qu’il n’y en a aucun, de sentier, mais cela impose d’aller les chercher sur place, au-petit-bonheur-la-chance… Ce programme n’est pas bien engageant. Et la première tentative sera avortée avant même d’avoir été sur place.
Deux mois plus tard, encore.
À force d’imagination, et d’observations, une solution s’est enfin dessinée. Plutôt que d’attaquer l’obstacle de face, prenons-le par le côté. Il y a là comme une maxime de base, pour certains métiers de bataille, mais je n’y avais pas pensé de suite dans mon cas de chercheur d’arche.
C’est ainsi que j’ai ourdi un plan d’approche en montant par le côté de Montama, par les pistes forestières locales, pour finalement arriver à quelques centaines de mètres de distance seulement de la zone visée. La différence - et elle est de taille - c’est que l’approche qui reste à faire est horizontale (ou presque), et non verticale, ce qui est un énorme avantage. Une inconnue reste toutefois : après l’arête nord-est, sera-t-il possible de traverser vers le bloc rocheux ??
Nous verrons cela en temps utiles, et sur le terrain.
Hier.
Voici l’épingle à cheveux de la piste, celle où il est prévu de quitter le monde balisé…
Un gros caillou en marque le départ.
En ce joli mois de mai, le temps n’est pas bien stable. À la verticale, se trouve une poche de ciel bleu. Mais tout autour, plein de nuages, allant d’un blanc pur jusqu’au gris relativement foncé, constituent une compagnie peu réconfortante.
La forêt est très courte avant de déboucher dans le premier vallon d’éboulis dont la présence avait été déduite sur photo. Quelle n’est pas ma surprise de constater qu’en fait d’éboulis, il s’agit de tout autre chose. Ce sont bien des pierres qu’il y a là. Mais ces pierres ont toutes la même dimension, et cette dimension est toute petite : trois ou quatre centimètres, guère plus ! Il s’agit d’un concassage de roche calcaire, à la taille mini…
Une trace de bête est là, qui coupe le flanc du vallon, à l’horizontale. Elle est très confortable, et je ne m’en prive pas. Mais quelle ambiance ! Les chaussures, tapant sur ces petites pierres leur font faire un bruit clair, comme une porcelaine qui se brise. La surprise, c’est aussi que, malgré l’impression d’instabilité que l’on pourrait craindre de ce versant de cailloutis, il n’en est rien : tout tient bon, suffisamment. Et je file à bonne allure….
Le second vallon de cailloutis est plus grand que le premier. Il est plus impressionnant aussi. Ici, j’ai la sensation de quitter la terre, et de me trouver dans un « ailleurs ». Heureusement il fait encore assez beau. Car sinon, l’angoisse pourrait apparaître, et me prendre…
Tiré par l’envie de savoir si l’arête pourra se franchir et si l’on peut atteindre le fameux bloc rocheux, j’avance.
Petit à petit, la sensation d’isolement, d’être loin de tout, se minimise, et une certaine tranquillité revient. L’arête est là.
Plus de doute. La suite est infranchissable. D’abord il y a des rochers, qui sont très raides pour ne pas dire verticaux. Mais de plus il y a tout une végétation qui vient obscurcir le terrain, le rendre illisible, et dangereux…
Fin de partie pour le bloc de rochers. Il n’est plus question d’y aller par ici.
Ne reste plus qu’à modifier le programme prévu et à adopter l’option, c’est-à-dire à suivre l’arête vers le haut jusqu’au sommet. Cela va en devenir le but principal de la sortie.
Je ne croyais pas si bien dire : le but principal de la journée !
La pente devant est... pentue.
À gauche donc, c’est la falaise. À droite, ce sont des éboulis se trouvant au-dessus des cailloutis du second vallon, des éboulis ressemblant à des ravines sérieuses : ne pas s’y aventurer !
Entre les deux, soit plusieurs mètres de large quand même, c’est une forêt de buis. Des buis serrés ! De temps à autre un gros pin bouche le passage, et il faut se tirer à ses branches pour passer au-dessus de lui.
Grâce à quelques trouées, la progression devient plus aisée et, petit à petit, la pente se réduit, se calme. Les panoramas s’ouvrent sur les alentours : tout devient facile. Ces prairies sommitales sont vraiment accueillantes. Si ce n’était la pluie fine qui démarre, le coin serait idéal pour un casse-croûte.
Dernière inconnue : la descente du sommet. Sur la carte, aucun chemin n’est tracé. Seule une limite administrative est notée. Comptant que cette limite soit additionnée d’une vague trace, je m’engage le long de la vieille clôture dont les piquets faméliques tiennent encore un peu debout.
En peu de distance la forêt fait sa réapparition. Et – surprise encore une fois – une piste à double ornière commence, qui attaque la descente droit devant, sans hésitation.
Je fonce.
Dans cette forêt, ce sont des hêtres. Aucune autre essence.
Beaucoup, pour ne pas dire tous, sont des rejets d’une souche dont le tronc initial a fait l’objet d’une coupe ancienne. Ce qui fait qu’à chaque endroit, ce n’est pas un tronc qui monte, mais plusieurs troncs, se gênant les uns les autres, formant des bouquets dressés vers le ciel. Je suis admiratif de ce sous-bois, propre, clair, donnant envie d’y déambuler.
Et que dire de cette piste, en ligne droite jusqu’en bas, encadrée de ces hêtres de part et d’autre, dont les branches en une symétrie splendide forment une voûte impériale au chemin.
Impériale car, pour parachever le décor, un tapis de feuilles, d’une couleur unie et séché par l’hiver, couvre le sol, assouplit le pas, et froufroute sous les semelles…
Marcher ici est un rêve pur !
L’arrivée au bas de ce chemin, au col de Montanit, suscite un petit regret, comme l’annonce d’une fin, car les surprises sont maintenant, à coup sûr, terminées. Il n’y a plus qu’à se laisser aller et suivre le GR de Pays…
Parfois, bordant cette piste, une clairière parfaite donne envie de venir planter là sa tente, et de profiter d’un lieu calme, beau, s’apparentant à ce que pourrait être le paradis sur terre.
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Auteur : François Lannes
Avis et commentaires
Oui j’ai pris quelques photos, et ce soir je les aient placées dans une fiche rando.
Bonjour Adalric,
Tu as raison, cette solution de stationnement à Saint Julien en Beauchêne est très commode et mérite d’être utilisée.
A la descente du sommet de la Cuillera, dans la hêtraie qui forme voute au-dessus de la vieille piste, as-tu fait quelque photo pour montrer les couleurs de l’automne ??
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Bonjour BA42,
Je n’ai pas encore la réponse à ta question.
Cela va constituer l’une des prochaines sorties de cet automne.
Enfin, j’espère...
Mais selon toute vraissemblance, il ne s’agira que d’un large porche, et pas plus. Sauf qu’il faut aller vérifier : sait-on jamais....
Et finalement, il y a une arche ?
Parcours astucieux et varié, merci.
D1075 - 150 m après le pont se trouvant à l’entrée de St-Julien-en-Bauchêne, il y a un grand parking sur la droite. En bordure sud de celui-ci, se trouve le GR de pays qui traverse le Grand-Buëch, passe sous le chemin de fer, laisse "le Moulin" sur la gauche et rejoint la D511 au point 944 m.
Bonjour Dyn’s,
Surtout ne te prive pas !
Du sommet de la Cuillera, les points de vue sont très beaux.
Comme ceux depuis Faucon.
Cette région naturelle - comme il faut appeler le Bochaine du Haut-Buëch - a vraiment plein d’attraits. Et pour occuper les demi-saisons, elle est géniale.
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Superbe François, je ne manquerai pas d’y aller faire un tour !
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