Sortie du 26 mai 2023 par CourtePatte Fort de Dormillouse (2505m), Pics de Savernes (2344m) et de Bernardez (2430m), Vallon de Provence
Un itinéraire élargi pour profiter, outre les sommets et les lacs, d'une forêt ancienne aux arbres vénérables.
Itinéraire, carte // Fiche topo
Topo de référence
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Conditions météo
Beau le matin. Dans l’après-midi, nuées menaçantes entrecoupées d’éclaircies.
Récit de la sortie
Dans son ouvrage consacré à la Restauration des Terrains en Montagne, "Les sentiers de montagne des forestiers", Hervé Gasdon décrit ainsi la forêt sous le Lac de la Cabane : "une forêt ancienne (...) constituée d’arbres d’âge vénérable avec une naturalité importante". Il n’en fallait pas tant pour me faire accourir dans ce secteur du versant nord de la Basse-Ubaye que j’avais envie de découvrir depuis un petit moment. Et pour ne rien rater de cette forêt, je démarre du Lauzet-Ubaye. Le Pic de Bernardez me fera le dessert.
La forêt ancienne à proprement parler ne commence qu’à partir de 1800m. Les amateurs d’arbres remarquables qui suivent le topo à partir du parking du Col Bas se régaleront déjà à faire un simple aller-retour, sur le sentier qui longe le nord du Lac de la Cabane, jusqu’au point coté 1916. Il se trouve là d’énormes mélèzes patriarches aux troncs larges comme des armoires, et dont les branches basses feraient déjà des arbres respectables. Et si parfois des pans entiers de leur ramure sont morts, si leur écorce est ravagée par l’âge, en levant la tête l’on voit qu’une brume verte continue à éclairer leur cime.
Il n’y a pas que les mélèzes qui méritent le regard. À proximité du Lac de la Cabane, on trouve également des épicéas spectaculaires, noués comme des poulpes et chevelus de lichens ; et en ouvrant l’œil dans le mélézin on pourra également remarquer des pins cembros de tous âges.
Aujourd’hui, la forêt était l’objectif premier, et ça tombe bien car la météo de l’après-midi n’était pas donnée pour très joyeuse. J’étais donc préparée à trouver les lacs dans le brouillard, et peut-être même le Pic Bernardez sous les gouttes. Mais en émergeant de la forêt, je suis accueillie par une carte postale : la soie bleue du Lac de la Cabane serti entre ses conifères. Ça va bien ! La couleur n’a pas encore déserté le paysage. Mais de gros nuages gris à ventre lourd pèsent au-dessus de la crête : filons sur le Col Bas avant que le temps ne se gâte.
Enfin, "filer" c’est façon de parler. Parce qu’avant d’atteindre le Col Bas il y a la zone humide du Vallon de Provence et son chapelet de lacs de tourbière. Impossible de ne pas s’arrêter devant ces petits lacs, brouillés par les herbes aquatiques et crevés de mottes jaunâtres. C’est toujours un peu mystérieux, un lac de tourbière, on ne sait jamais très bien où finit la terre et où commence l’eau, ni qui est en train de grignoter l’autre.
Je monte au Pic de Bernardez accompagnée par le roucoulement sourd des lagopèdes dans les pierriers. Là-haut, le soleil joue à singulariser les sommets sur fond de nuées grises. Hop ! un coup de pinceau sur l’Estrop. Hop ! Neillière dans les projecteurs. Tout ça est très romantique, même si quelques gouttes de pluie erratiques m’obligent à sortir le coupe-vent.
Il n’est pas encore très tard lorsque je parviens au Col de Bernardez. Plutôt que descendre sur Seyne qui était mon idée initiale, il me vient une furieuse envie d’enfiler le sentier balcon et de monter à Dormillouse : encore un secteur que j’avais envie de découvrir, et puis de Dormillouse, je redescendrai sur Saint-Vincent-les-Forts ; ça devrait être vite plié et de toutes façons je suis bonne pour rentrer en stop à Gap, alors...
Sur le sentier balcon j’ai des éclairages inespérés. Les grains que je voyais pilonner le Dignois s’en vont barbouiller les cimes de l’Estrop, et la lumière déclinante baigne le pays de Seyne. Depuis le fort de Dormillouse, ce sont des jeux de lumière sur Serre-Ponçon, sur les sommets en rive droite de l’Ubaye ; j’en profiterais bien plus longtemps mais il est grand temps de redescendre.
Oui, il est temps de redescendre. Car j’ai été un peu optimiste sur le temps de parcours jusqu’à Saint-Vincent-les-Forts, m’assurent les pancartes. L’itinéraire le plus rapide est donné pour 1h45, 8km : ça va être la course avec la nuit.
Bien sûr, c’est maintenant que le soleil couchant embrase la montagne, transformant chaque fleur en flammèche au flanc des herbages - et je ne peux plus me permettre de m’arrêter ! Bah : il fallait bien qu’il y ait un prix à payer pour cette journée bien remplie. Aucun regret.
Photos
Auteur : CourtePatte
Avis et commentaires
On est déjà conquis par cette belle poésie pour la célébration des arbres remarquables et des différents paysages.... Alors avec toutes ces belles photos : bravo !
Merci à vous, ça fait plaisir !
@Yann : c’est vrai que j’aime les sorties "bien remplies", le dénivelé étant souvent le prix à payer. Mais je dois reconnaître qu’une fois au sommet de Dormillouse, je n’aurais probablement pas eu l’énergie pour ne serait-ce que 300m de D+ supplémentaire !
Je rejoins....Photos superbes, surtout pour moi la 33 et la 36, on dirait des peintures !
Bravo pour tes longues bambées et tes récits passionnants.
Très belles photos et légendes qui vont de paire, surtout 33, 35 et 36.
La vache, tu aimes les sorties à rallonges et le dénivelé !
Les photos sont superbes en tout cas.
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