Sortie du 12 septembre 2021 par CourtePatte Pic du Mourre la Mine (2955m) et Pointe des Moutières (3052m) par la crête du Pré du Bouc
Un festival de roches et de couleurs dans un dépaysement de tous les instants.
Itinéraire, carte // Fiche topo
Topo de référence
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Conditions météo
Beau mais ciel chargé le premier jour ; grand beau le lendemain.
Récit de la sortie
Ce Pic du Mourre la Mine, impossible de ne pas le repérer en montant au Val Estrèche depuis les Baumes. Et lorsque j’avais cherché à en savoir plus long sur cette montagne et son lambeau de glacier, j’étais tombée sur le topo de Michel qui m’avait immédiatement fait envie. Moi qui voulais retourner bivouaquer dans le secteur après l’éblouissante découverte de Val Estrèche et Crupillouse, c’était la destination idéale.
Reste que je voulais une fenêtre météo pas trop encombrée de nuages, ce qui n’est pas gagné cette année. Si bien que lorsque les prévisions météo ont enfin promis un créneau pas trop encombré, l’occasion était à saisir. Sauf que... dimanche matin, un dernier coup d’œil aux prévisions et mon cœur se serre. Météoblue a changé son fusil d’épaule et prévoit une couverture nuageuse bien plus développée que ce que le site annonçait la veille ; trop tard ! je suis en route.
C’est donc un ciel bien plus chargé que prévu qui bouillonne au-dessus du Champoléon lorsque j’entame la montée vers le refuge ; mais pour l’instant, impossible de savoir si cela descend sous les 3000. Je suis sûre qu’une partie au moins de la balade sera lumineuse, et j’ai donc quelque espoir de profiter des couleurs du pays.
Au niveau du Jas des Pierres, je choisis d’éviter la bergerie comme suggérait le topo. Mais je n’ai pas imprimé de photos de cette section, et je me déporte un peu plus à l’ouest, et un peu plus longtemps, que je n’aurais dû. En sorte que je me retrouve soudain dans un secteur non décrit par le topo, au pied de la barre rocheuse du sommet 2414. C’est une sorte de chaos monstrueux d’énormes blocs d’une roche grisâtre, qui ne me semble pas en rapport direct avec le calcaire bariolé du haut de la barre ; elle a parfois la texture d’une sorte de poudingue ou de grès très grossier, rongé par l’érosion. Le spectacle est colossal : on dirait que les dieux ont joué aux dés sur cette pelouse, et on pourrait passer des heures à explorer ce labyrinthe. Et bien sûr, tout ça est coiffé par les étranges draperies de la barre rocheuse posée sur son soubassement détritique rougeâtre.
N’empêche que ça me vaut quelques minutes de gamberge : il me semble que si cet endroit était sur le trajet du topo il en serait fait mention. Aurais-je tant dévié que ça ? Peu importe : à la base du conglomérat rougeâtre, une merveilleuse petite sente me permet de basculer côté Muande, où je retrouve peu ou prou l’itinéraire prévu. Avec des vues à couper le souffle sur la deuxième merveille de l’itinéraire, le Puy des Pourroys et son chatoiement de couleurs dans la caresse du soleil de septembre.
J’aborde la Crête du Pré de Bouc avec des sentiments mélangés. D’abord elle a l’air bien raide cette échine, surtout avec mon chargement de bivouac ; et puis c’est un peu gratuit non ? Puisqu’il faudra redescendre un peu à l’autre extrémité ? Il est certain qu’on peut se passer de la gravir et se contenter de la longer, mais ce sera dans le pierrier... et on se privera d’une petite marche d’arête pas technique du tout : même avec le gros sac je n’ai aucune difficulté à rester sur le fil. Et pendant ce temps la vue dégringole dans le vallon des Baumes 1000 mètres plus bas.
Bonne nouvelle : les nuages sont partis peser sur les grands sommets des Écrins, et la Pointe des Moutières est parfaitement dégagée. Lorsque j’arrive au sommet j’ai le temps de parcourir toute la crête dans les deux sens et d’installer le bivouac avant de prendre position pour le spectacle du crépuscule.
Le bivouac sera un peu épique. La météo annonçait 3° à 3000m mais ce n’est pas l’avis de mon sursac ; trempé par la condensation sitôt le soleil disparu, il sera bientôt envahi par la glace à l’extérieur comme à l’intérieur. Et ça me vaudra une nuit sabotée par l’appréhension du froid : c’est qu’elles sont déjà longues les nuits de la mi-septembre... J’en serai quitte pour la peur, car mon brave duvet et mes multiples couches rempliront très bien leur office.
Là-dessus, au petit matin, drame : je n’ai pas de café ! il a été victime d’un transfert de sac de dernière minute. Tant pis, il fait trop froid, je boirai... de la bête eau chaude. Et je me console avec un diorama de sommets en dents de scie, découpés comme au rasoir sur les lueurs de l’aube : on n’a aucune peine à distinguer la grande masse du Viso à l’horizon.
Côté exposition lumineuse, je recommande la Pointe de Moutières pour le bivouac. On est éclairé aux premiers rayons du soleil et les affaires n’ont jamais séché aussi vite ; je sens mon métabolisme s’élever, façon marmotte, de minute en minute. Tant mieux : c’est bientôt le moment d’entamer la redescente.
Cap sur le lac des Selliers. "petite flaque de fonte", dit la sortie de Mick1018. Évidemment il ne faut pas s’attendre à Crupillouse ; mais sa teinte olive actuelle ne dépare pas dans le décor ; et surtout, c’est le premier lac de montagne auquel je vois cette espèce de vasière grise, à texture très fine, où la moindre pluie dessine des serpents.
Il est surplombé par une espèce de butte noire en pure roche volcanique, coiffée d’une pelouse où l’on s’attarderait bien. Ce noir et ce vert, ça vous a soudain des petits airs d’Islande, ou de la Réunion ; décidément cet itinéraire c’est tout un voyage.
Puis c’est la redescente vers la Muande, et la vallée du Tourond. Au passage j’admire de nouveau le secteur de la barre rocheuse 2414. Oh ! mais je crois que je reviendrai...
Photos
Auteur : CourtePatte
Avis et commentaires
Waouh ! Quelles vues ! Au bon endroit, au bon moment !
Photo 7 : plutôt que des coulures j’opterais pour des strates. Avec un socle de couches horizontales ça fait un assemblage bizarroïde mais magnifique.
Merci !
Oui les nuages c’est comme les épices en cuisine, tout est dans le dosage...Le problème c’est que le cuistot change tout le temps !
Le sur-sac n’est pas une option pour moi : même avec la condensation (qui n’est pas systématique) il m’apporte une isolation thermique bien réelle. Pour la condensation, je glisse entre le duvet et le sur-sac un bête châle en acrylique, qui absorbe généralement l’essentiel de l’humidité (et, entre autres vertus, sèche quasi-instantanément au grand air).
Superbe sortie !
Ce vallon est une merveille, les lieux pour y bivouaquer ne manquent pas, tant sur les sommets que sur les belles pelouses !
Même si il est toujours préférable de partir par beau temps, les nuages peuvent apporter des contrastes et des couleurs incroyables surtout quand le soleil perce juste avant de disparaître à l’horizon.
Le sur-sac, je ne m’en sers plus, ça a toujours condensé à l’intérieur et trempé la surface extérieure du sac de couchage. Du coup trempé par la rosée ou la condensation, ça reviens au même, juste un peu moins de poids dans le sac !
Et puis, j’ai bien ri sur le drame matinal : pas de café ! Ça me ferais jurer aussi, juste un peu ! Ha ha !
Ah c’est un endroit assez extraordinaire. Les photos m’avaient fait envie mais j’ai trouvé ça encore plus beau "en vrai"...On voudrait explorer partout !
Quelle merveille ces roches ! Et ces couleurs !
Tout simplement magnifique....
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