Sortie du 24 septembre 2023 par Peyuko Brec de l’Homme (3211m)

La nuit au refuge a plutôt été bonne. Après "l’échauffement" la veille au Bec Roux, mon idée du jour est d’enchainer Pointe des Cirques, Brec de l’Homme et Tête de la Fréma. Je sais que les deux premiers sommets ne sont pas du goût de Silvia et je lui propose de monter de son côté soit à la Fréma, soit à la Pointe d’Aval. Les 3320m de cette dernière lui donneront plus envie que les "maigres" 3151m de la Fréma... on peut vite devenir accro à la hauteur !

Avec Sarah, nous prenons le chemin du lac des Neuf Couleurs en passant par le petit lac de l’Étoile. Je me souvenais que le topo de la Pointe des Cirques exigeait de remonter un affreux couloir et que rester à gauche de celui-ci facilitait l’ascension. Sans prendre le temps de bien observer le terrain, je file vers un couloir détritique avec des gros rochers sur sa gauche, pensant que c’est le bon.

Ce n’est qu’une fois au milieu de ce dernier que je me rends compte que je me suis trompé, nous sommes à l’ouest de la Pointe des Cirques alors qu’il fallait y accéder par l’est ! Honteux, j’avoue ma grossière erreur à Sarah mais maintenant que nous sommes lancés, nous décidons de poursuivre, d’autant que s’il y a un cairn, c’est que ça doit conduire "quelque part"...

Avec ce cairn, je me prends même à rêver d’une voie ouest menant à la Pointe des Cirques mais au Col de Chambeyron - puisque c’est là que nous arrivons - je déchante vite. Il est peut être possible de rejoindre le sommet par là mais nous ne tenterons pas aujourd’hui, sans équipement et avec des restes de neige sur la paroi.

J’ai beau m’être planté, nous sommes tout de même gratifiés de superbes panoramas et nous prenons pied sur un sommet cairné juste au-dessus du col. De là, le Brec de l’Homme, crépis de blanc sur sa face nord, en impose.

Dans les pentes raides et croulantes où nous évoluons, Sarah n’est pas à son aise, surtout pour descendre or, le Brec de l’Homme offre le même type de terrain. Nous nous mettons donc d’accord : elle descendra à son rythme vers le lac des Neufs Couleurs pendant que je monterai au Brec et nous nous rejoindrons à la Tête de la Fréma.

Je gagne ainsi par une traversée en dévers une sente au balisage jaune qui monte en lacets vers ce "deuxième" sommet convoité. Cette fois, je suis sur la bonne voie !

Quelques mètres sous le sommet, je croise un couple d’italiens qui renonce à poursuivre car la sente est gelée. Je tâte le terrain et me rend vite compte que c’est effectivement délicat. En revanche, je repère sur la droite une arête presque totalement dépourvue de neige à laquelle il est possible d’accéder par une vire étroite et exposée.

Je suis alors rejoint par une randonneuse italienne et nous entreprenons ces dernières difficultés ensemble. Avec ces ultimes efforts, la récompense au sommet n’en sera que plus grande.

La vue aurait d’ailleurs mérité une plus longue pause mais pour ne pas faire attendre Sarah et Silvia trop longtemps, je ne m’attarde pas et redescends en suivant l’improbable sente qui rejoint le Pas de l’Infernet (Passo Terre Nere pour les Italiens).

Puis, l’astucieux balisage rouge et bleu du SRC (Sentiero Roberto Cavallero), permet de se frayer assez aisément un chemin dans le dédale de blocs rocheux qui surplombe le lac des Neuf Couleurs sur son versant ouest, jusqu’à atteindre le col de la Gypière.

Un dernier coup de collier pour les 150m de dénivelé qui me séparent de la Tête de la Fréma et je retrouve Sarah. Le turquoise du lac del Vallonasso de Stroppia contraste magnifiquement avec le saphir des Neuf Couleurs sous le regard du Brec de Chambeyron qui trône en maître sur ces terres arides.

La descente sera longue, surtout passé le refuge. De son côté Silvia est très fière d’avoir gravi la Pointe d’Aval et nous fêterons nos aventures mutuelles et respectives autour d’une bonne bière à Fouillouse.

Comme si ces deux jours n’avaient pas été suffisamment riches en merveilles et en émotions, sur la route du retour, nous aurons la chance de voir un cerf, majestueux, aux bois immenses, digne d’un conte. Les appareils étaient rangés dans le coffre et il n’y a donc pas de photo mais un souvenir indélébile imprimé dans nos esprits.