Sortie du 20 août 2022 par Forêts-myrtilles-et-caillasse Col des Bataillères (2804m) et Col du Cheval Blanc (2791m) au départ du Refuge du Thabor

Mi-août.

J’appelle le frérot.

• " Hey ! Ça te dit d’aller te cailler les miches du côté du Thabor ce week-end ?"
• " Et ton genou ?"
• " .... "
• " Ok. À quelle heure à Modane ?"

Ça fait trois mois qu’il fait beau et chaud presque tous les jours, un été lisse et torride, qui grille la végétation, assèche les rivières. Les étangs que je fréquente pour aller voir les oiseaux en attendant de pouvoir retourner un peu plus près du ciel ne sont plus que des marigots saumâtres. Vu de chez moi, la Prairie de la Dent n’est plus que paille. Besoin d’air frais... Besoin d’aller là-haut, même si c’est encore un peu trop tôt. Bientôt cinquante ans et impatient comme à vingt, on ne se refait pas.

Le but c’est un sac léger. Je fais le tri et ne garde que le minimum, tant pis pour le confort. Mes affaires de rando, un sac de couchage, un sur-sac, le mini-matelas, le mini-réchaud avec la mini-cartouche et la mini-casserole, le filtre à eau, un lyoph’ et let’s go bowling dude.

Parking du Lavoir, 14h.

C’est blindé de monde. Une dépression a traversé les Alpes la veille, apportant quelques pluies, un peu de fraîcheur. Quelques nuages résiduels accrochent encore un peu les cimes et font concurrence au bleu profond du ciel. Le torrent gronde au fond de son lit mais on sent bien qu’il n’est vraiment pas à son plein potentiel !

Le cheminement en rive gauche du torrent est extrêmement doux, l’articulation défectueuse ne se plaint qu’à peine. On lâche le sentier un peu en dessous du refuge pour se laisser porter par la pente qui monte tranquillement vers le col, le Cheval Blanc, monumental, en ligne de mire. C’est beau, c’est facile, les ombres s’allongent tout doucement, quelle bonne idée d’être venus !

On arrive au col l’air de rien, on aurait pu continuer encore comme ça des heures tant la marche est paisible dans ce vallon. Le lieu du bivouac est vite trouvé, sur la crête en allant vers le col des Bataillères où on trouve quelques morceaux d’obus rouillé. Même ici a résonné le son du canon, la folie de quelques-uns payée par le sang du plus grand nombre. Pensées sombres pendant quelques instants alors que sur notre continent les bruits de bottes se font de nouveau entendre.

Le trouble est vite dissipé par la splendeur des lieux. Ce Cheval Blanc... Quel sommet tout de même ! Pittoresque au possible, ses lames verticales de quartzite semblent défier la gravité. L’immense chaos de blocs à ses pieds témoigne qu’elle finit toujours par l’emporter. Sur l’autre versant, c’est les Thabor, le Mont et le Pic, enserrant avec le Cheval le glacier rocheux. De la caillasse partout, le bonheur !

Il est un peu plus de minuit. La voûte céleste tapisse le ciel, scintillant de mille feux délicats, parfois zébrée par la lumière intense d’une étoile filante. Le Cheval Blanc accroche un peu de la lumière stellaire et sa silhouette n’est pas entièrement sombre. C’est tout simplement féérique.