Sortie du 20 septembre 2017 par Thierry GARCIN Grand Pinier ou Pic Brun (3117m) par Freissinières - Lacs Palluel et Faravel
Belle randonnée à la journée sur un sommet de plus de 3000m, agrémentée de deux superbes lacs d'altitude. L'ascension du Grand Pinier (3117m) enneigé a d'autant plus de caractère qu'il ne faut pas hésiter un instant à aller y user ses godasses dès que l'occasion se présente dans ces conditions.
Itinéraire, carte // Fiche topo
Topo de référence
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Conditions météo
- Météo : grand beau, temps frais et sec, légère brise au-delà de 2800m. Froid au sommet.
- Conditions sur le terrain : au-delà de 2800m neige fraîche (20cm à 40cm environ, selon les endroits) des jours précédents (chutes de neige de début septembre 2021) dès l’entame de l’ascension de la crête nord-est (crampons dans le sac et piolet en main, par précaution).
Récit de la sortie
PRÉAMBULE :
Début septembre 2021, une subite dégradation météo et des chutes de neige sur les massifs alpins en altitude interrompirent ma saison de crapahut. Je pestais un peu, d’autant que fuyant le monde plus que tout (le Chamois déclinant est un bipède assez solitaire…), je table toujours sur l’arrière-saison, à peu près jusqu’au passage à l’heure d’hiver en octobre, pour aller me balader sur les cimes.
Rendues à la fraîcheur des jours raccourcissant dans une belle lumière, y randonner est un perpétuel bonheur dont je ne saurai me priver que lorsque le temps, hélas, aura fait son œuvre sur moi... Fort heureusement, cette dégradation météorologique de fin d’été fut de courte durée et à la mi-septembre, profitant du retour d’un temps sec annoncé pour plusieurs jours, je bouclai mon sac dare-dare, l’ascension du Grand Pinier en tête : un 3000 facile d’accès.
Son ascension en solitaire, comme à mon habitude, m’allait être d’autant plus agréable et ludique qu’un fin manteau de neige au-delà de 2800m recouvrait son sommet tranchant un ciel bleu limpide, procurant à cette randonnée sa toute petite touche, j’oserai dire, himalayenne.
L’ASCENSION :
Du parking désert en bout de la vallée de Freissinières, aux aurores passées de peu je traverse le Pont des Oules et prend le large sentier en direction de Dormillouse. Plus haut (au point coté 2022 sur la carte IGN), au sortir de la splendide forêt de mélèzes accrochée à flanc de montagne, je bifurquerai plein ouest par le sentier bien tracé en direction du Lac Palluel. Je connais le coin pour y avoir plus d’une fois écorché mes godasses et je marche presque machinalement, sans perdre de temps tout en prenant mon temps…
Pas un chat en ce jour de mi-septembre qui s’annonce radieux, a fortiori à cette heure matinale où la fraîcheur me ragaillardit et m’enchante à la fois. Il y a des jours comme ça où le bonheur semble irrésistible et vous enlace… La nature aux portes de l’automne et comme à l’arrêt se prépare tôt cette année à hiverner, les pelouses perlent de rosée, tout est silence bienfaisant, au loin les crêtes blanches déjà étincelantes cisèlent le cobalt...
Les Cabanes d’alpage de Palluel dépassées, j’atteins en quelques lacets le Lac Palluel. Un air frais m’y cueille, ses eaux miroitent dans la lumière pure du ciel parfait dont l’azur emplit mon âme. Pas un bruit. Face à moi, légèrement au sud-ouest, se dressent les 3117m du Grand Pinier. Revêtu de sa parure blanche émaillée de rochers il a presque la fière allure pyramidale d’un petit sommet himalayen et attire le regard comme un aimant le fer. Le topo et la carte en tête, comme à l’accoutumée, je longe la rive gauche du lac puis m’élève par des pentes terro-herbo-pierreuses vers le col marqué du point coté 2716 (sur la carte IGN), affaissement caractéristique entre la Tête du Serre Eyraut (2745m) et le début de la crête nord-est du Grand Pinier enneigée dès sa base.
Pour moi, là débute véritablement l’ascension à proprement parler, d’autant qu’avec la neige ayant enseveli les traces de passage il va me falloir trouver le meilleur chemin possible. De toute façon l’itinéraire est évident et c’est sans la moindre appréhension que je me lance dans l’ascension, piolet en main, paré à dégainer mes crampons à portée de main sur le dessus du sac – au cas où. La glace par endroits m’incite toutefois à la prudence et je choisis de tracer là où la neige, tout en portant, permet à mon pied de s’y ancrer avec assurance. Inutile de faire le malin, les accidents arrivent souvent bêtement et dans des sections faciles… Parfois je m’enfonce jusqu’à mi-mollet dans la neige, parfois seules crantent mes semelles. Quelques cairns çà et là viennent conforter mon choix d’itinéraire choisi à l’estime dans la pente jamais très raide. Rien de sorcier.
Alors que je m’élève je n’ai de cesse de m’enivrer du paysage qui aux quatre points cardinaux se dévoile à moi telle une récompense. C’est bien cela un sommet, aussi modestes soient son altitude et sa difficulté, il faut néanmoins toujours pousser sur les cuisses pour y parvenir, et une fois là-haut on se sent doucement heureux.
Je foule le sommet du Grand Pinier immaculé de neige. Il y fait un air vif m’obligeant à rajouter une couche sur ma carcasse après la petite suée de la montée. Je m’attarde un peu sur le panorama qui, sans y être exceptionnel, valait néanmoins le détour : au nord-est émerge au lointain la Tête de la Lauzière, à l’est s’étend la profonde vallée de Freissinières dominée au Pont des Oules par la Tête de Gramusat, le Piquet et la Crête des Uvernaus, au sud l’Entre Piniers et le Petit Pinier ne demandent qu’à être gravis, au sud-ouest s’étendent la vallée du Drac Noir et le Champsaur, au nord-ouest la crête rocheuse du Grand Pinier dévale vers le Col des Jalabres, au nord pointent les hautes cimes des Écrins.
La descente du sommet jusqu’au col (marqué du point coté 2716 sur la carte IGN) ne présente aucune difficulté, d’autant que je n’ai qu’à reprendre ma trace en sens inverse, puisque je retourne au Lac Palluel par le même itinéraire. C’est donc rapidement que je parviens sur la rive droite du Lac Palluel (au point coté 2468 marqué sur la carte IGN).
Sur le sentier plein sud en direction du Lac Faravel, je traverse un curieux champ de cairns (à peu près en dessous du point coté 2480 marqué sur la carte IGN). C’est dire si les années ont vu de nombreux randonneurs passer par ici : je viens me rajouter anonymement à eux. Ce sentier bien tracé reliant les deux lacs est agréable et offre un large visuel sur les alpages et sommets environnants. L’arrivée au joli Lac Faravel dans sa cuvette glaciaire est toute aussi distrayante, avec son vallon morainique plein ouest conduisant au versant nord du Petit Pinier. Un fort courant d’air froid au point de me geler les mains et me filer quelques frissons m’incite cependant à ne point m’y attarder. J’enquille donc la descente, direction Peyrourasses (marqué sur la carte IGN). À ma droite, donc au sud, les troupeaux ont rendu sa quiétude à l’alpage du Pont de Fer (qui sait si les premières chutes de neige auront précipité la fin de l’estive ?…). Je dévale toujours par le large sentier, en direction de Dormillouse pour une halte bien méritée au sympathique gîte de l’École : une succulente bière fraîche m’y attendait. Un souper chaud et une nuit de sommeil ne seront ici pas de trop...
En effet, parti le matin-même à 4h00 de la Côte d’Azur, j’étais à 7h30 au parking près du Pont des Oules, à 11h15 au sommet du Grand Pinier, à 16h00 à Dormillouse. J’ai donc bouclé ce magnifique parcours en 8h30 (non pas d’un pas de course, mais sans pause puisque je m’hydrate et m’alimente toujours en marchant).
CONCLUSION :
L’ascension du Grand Pinier enneigé a d’autant plus de caractère qu’il ne faut pas hésiter un instant à aller y user ses godasses dès que l’occasion se présente dans ces conditions (crampons-piolet obligatoires). Jamais difficile techniquement parlant, ce sommet mérite vraiment un détour, d’autant plus que les deux superbes lacs Palluel et Faravel (hélas pour combien de temps encore, vu le réchauffement climatique…) procurent à cette randonnée un attrait indéniable supplémentaire. Les 1700m de dénivelé positif requièrent néanmoins un minimum de condition physique, mais rien d’exceptionnel pour un marcheur entraîné.
Photos
Auteur : Thierry GARCIN
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