Sortie du 22 août 2020 par Rem Chab L’Aiguillette (2610m) par la cabane des Mulets

Premier récit sur ce site pour mon premier bivouac en solo sur les pentes de l'Aiguillette, sommet sauvage de la chaîne de la Blanche. Initiatique.

Itinéraire, carte // Fiche topo

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Conditions météo

Bataille soleil VS nuages tout au long de la journée.

Récit de la sortie

Un week-end libre ? Check. Une météo qui s’annonce bien ? Check. La forme physique et le mental ? Au top. Le matériel acheté ? Au top la carte bleue ! Oui, tous les feux sont au vert pour me lancer dans mon défi, celui d’aller bivouaquer seul en montagne. Il s’agit d’une première pour moi, plus habitué aux randos à deux ou plusieurs. L’objectif est donc de monter à l’Aiguillette, sommet qui m’avait laissé un grand souvenir quand j’étais minot, lorsque je l’avais gravi avec mon père. J’avais alors une douzaine d’années. Depuis, cette pointe aux courbes élancées a toujours attiré mon regard depuis la vallée de La Blanche en me murmurant : "Oh, quand est-ce que tu reviens ?"

Il est environ 11h du matin quand je commence la rando, en descendant du bus Marseille-Barcelonnette. Je vais donc commencer de plus bas, environ 1300m d’altitude, pour rejoindre la Cabane des Mulets à 1700m. Au moins, la portion route puis piste me sert de bon échauffement. En montant, je croise plusieurs familles qui viennent à la Cabane pour piqueniquer et passer la journée : c’est vrai que c’est un lieu idéal pour venir avec des enfants. Ensuite, un peu plus haut, c’est le domaine des vaches où le sentier est encombré par plusieurs troupeaux (et des milliers de bouses !). J’ai beau savoir que ce sont des animaux paisibles, mais cela serait mentir de dire que j’étais totalement serein quand il a fallu passer au milieu de ces grosses bêtes à cornes qui te fixent sans relâche, l’air de dire : "Tu veux ma photo ?" Bah, du coup, c’est ce que j’ai fait, à voir dans l’album photo !

Après cet épisode, j’entre dans le monde du silence et de la solitude : il n’y a plus de vaches, plus de petites familles venues piqueniquer, et plus de sentier car je quitte la trace qui monte au col de La Pierre pour une longue traversée à flanc jusqu’au ravin des Clots de Selon (2000 m, environ 2h15 de marche). Dans la quiétude de la montagne, je suis seul et entame le début des vraies difficultés avec la remontée très raide sur la crête entre les deux ravins. C’est là que tu comprends qu’un sentier bien tracé dans une pente, c’est quand même bien utile ! Mon sac, bien que allégé au maximum (l’eau c’est lourd !), me tire vers le bas à chaque pas vers le haut. Physiquement, c’est nettement plus dur, d’autant que hormis un cairn salutaire en début de montée (ouf je suis sur la bonne trace !), il n’y a plus aucune indication. C’est donc ludique, mais physique.

Tandis que je récupère mon souffle, je constate que je ne suis plus seul... au-dessus de ma tête tournoient en effet plusieurs planeurs qui m’accompagneront jusqu’à la fin de la journée. Petit à petit, le sommet de l’Aiguillette se rapproche, ce qui comme dans toute ascension, permet de maintenir la motivation mise à l’épreuve. Elle sera au maximum au moment de se lancer dans la montée finale sur l’arête, après avoir rejoint le petit col, point de jonction avec la crête des Glièrettes. Comme dans mon souvenir il y a plus de 20 ans de ça, il faut mettre vite fait les mains pour franchir les ultimes gradins délités, avant d’arriver facilement au sommet et de retrouver non sans joie la croix, un peu déglinguée mais toujours debout (2610m, environ 4h).

Je peux alors profiter pleinement du spectacle offert en guise de récompense : une vue à 360° où tout y est, des Séolanes toutes proches en passant même par le Mont Blanc tout au loin (confirmé par mon appli préférée Peak Finder !). Les nuages nombreux mais pas menaçants sont transpercés à plusieurs endroits par les rayons du soleil, offrant de très jolis contrastes sur les reliefs de l’Ubaye, des Écrins, du Dévoluy et sur cette magnifique chaine de La Blanche qui s’étend devant mon regard jusqu’à Dormillouse. Je savoure ce moment que je fais durer presque une heure de contemplation, toujours sous l’œil des planeurs désormais quasiment à ma hauteur !
 
L’objectif sommet ayant été atteint, place désormais à l’objectif bivouac. Malgré la fatigue qui se fait bien sentir et un genou qui commence à grincer ("Hey pourquoi on repart là ?), je décide de poursuivre mon chemin le long de la crête des Gillerêtes pour atteindre le sommet de Neillère où je me dis que le plateau herbeux sommital pourrait m’offrir un bon lieu de bivouac. 1h30 d’alternance de montées et de redescentes en restant sur le fil de la crête, côté vallée de La Blanche avec le vent, côté Laverq avec les chamois en contrebas. Je fais la dernière montée sur Neillère à l’arrache, mais une fois sur le plateau, je constate que le vent s’engouffre bien comme il faut... Mon corps fatigué me dit : "Vas-y je suis mort, plante la tente et tant pis pour le vent, de toute manière il tombera avec la nuit..." Mais au vu des claquements de la toile face aux bourrasques, je me dis que la meilleure idée serait quand même de redescendre vers le col de Bernardez, où j’avais repéré lors d’une précédente sortie il y a deux ans, un autre lieu potentiel de bivouac. Je croise les doigts pour que cet endroit soit bien à l’abri car j’avoue, j’ai désormais juste envie de me poser et de pouvoir profiter du soleil couchant ! 

Bingo, l’endroit espéré est parfait, bien herbeux, presque plat et juste ce qu’il faut pour être abrité du vent, sans renier non plus sur la vue. C’est le 2e moment Nutella (mais boycott hein !) du jour, celui où tu enlèves tes chaussures et que tu peux te prélasser tout en admirant le paysage qui prend alors des couleurs dorées sous l’effet des derniers rayons du soleil. La suite est moins exaltante : l’obscurité tombe vite, le froid s’immisce et il va falloir affronter seul (il n’y a plus les planeurs !) la nuit dans un environnement sauvage. C’est la première fois pour moi, donc il y a forcément de l’appréhension. Mais une fois blotti dans le duvet, le sommeil ne tarde pas et mon choix d’utiliser des boules Quiès s’avère payant pour ne pas être en alerte à chaque bruit provenant de l’extérieur ! Je passe une bonne nuit, content d’être réveillé au moment du lever de soleil que j’admire juste en sortant la tête de la tente.

Je me fais quasiment une grasse matinée en ne levant le camp que sous le coup des 10h du mat, trop heureux de pouvoir profiter de ces moments uniques d’un matin serein en montagne. J’ai tout le temps devant moi pour redescendre (oui, mes jambes me disent : t’amuse pas à refaire du dénivelé positif aujourd’hui !) jusqu’à Seyne-les-Alpes par le GR. Sur le chemin, je ne suis pas fâché de croiser un couple de randonneurs avec qui je peux un peu discuter et qui me félicite pour mon petit périple. Je dresse alors le bilan de ces deux jours seul en rando : de la fierté, de la fatigue, de la solitude, et surtout du bonheur d’avoir évolué dans cet environnement magique qu’est la Montagne. 

Avertissements et Droits d'auteur

Randonnée réalisée le 22 août 2020

Dernière modification : 22 septembre 2020

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Avis et commentaires

Ah oui ! On les aime ces anecdotes de bivouac (enfin, de camping sauvage) !

Bienvenu à bord, merci pour ton commentaire sur ma sortie, j’aime beaucoup ce secteur. Merci aussi pour le lien, il y a de belles balades à voir.

J’aime bien les coins à vaches aussi pour l’absence de patous, cela dit ils ne sont pas tous agressif heureusement.

Les vaches peuvent parfois leur coup de folie, j’ai des souvenirs de courses improvisées dans des prés en Auvergne, lorsque j’étais jeune et que nous partions un mois en balade et faisions du camping sauvage le soir (les termes trek et bivouac nous étaient alors inconnus à l’époque), les vaches blanches avec des petits sont à tenir à l’œil ...

Un jour au petit matin nous avons étaient réveillés par des souffles puissants, une tête qui traverse la toile, c’était un taureaux d’une tonne au moins ! Waouh, il a plié la tente et dispersé tout le matos en dix secondes, c’est n’avions jamais étaient aussi vif pour parcourir 50 m et sauter une haie !

Super ta balade avec de belles photos ce ne gâche rien ! 🙂

Vos photos sont magnifiques, notamment sur la crête des Gliérettes (beau souvenir) merci !

Tu as bien résumé ! Merci pour ton commentaire. Et oui tu as raison pour les vaches VS patous... la suite au prochain troupeau traversé !

Bienvenue (et merci au passage pour le commentaire que tu m’a laissé sur la sortie au Petit Roux). Si je comprends bien, cette sortie était à la fois un pèlerinage et une Grande Aventure avec ces premiers pas en bivouac...Essai transformé on dirait.

En ce qui concerne les vaches, même si je reste attentive à leurs mouvements lorsque je traverse un troupeau, j’ai réalisé récemment que je les croisais presque avec plaisir désormais : "Ah les braves bêtes ! Au moins il n’y aura pas de patou !"

Merci pour l’accueil Vince ! Le site est vraiment bien fait, ça motive pour mettre d’autres contributions à l’avenir !

Bienvenue Rem Chab et bravo pour cette première contribution ! Très belles photos et récit vraiment sympa de ce bivouac (une thématique que l’on adore sur Altituderando !) en solo ! 😉

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