Sortie du 3 juillet 2023 par Peyuko La Roche Noire (3134m)
De loin, même si le Péouvou voisin fait relativiser, elle intimide. Quand on s'approche du col des Ugousses, elle impressionne plus encore avec sa face sombre et austère. Et pourtant, comme souvent, elle est malgré tout accessible au prix de quelques efforts. Un sommet sauvage avec un superbe 360°.
Itinéraire, carte // Fiche topo
Topo de référence
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Conditions météo
Grand beau et pas trop chaud, en un mot : idéal.
Récit de la sortie
Troisième jour dans le Queyras que je commence tout juste à découvrir. Après le Petit Rochebrune la veille, je jette mon dévolu sur cet autre 3000m, à la frontière avec l’Ubaye.
Départ matinal de la bergerie de Bois Noir. Les moutons et surtout les chiens sont parqués, je suis rassuré. Mais quelques centaines de mètres plus loin, je déchante au son d’une petite cloche. Je n’avais pas vu la cabane de la Luvine sur la carte et il se trouve que c’est une autre bergerie que longe littéralement le sentier, impossible de passer inaperçu. Un kangal et un patou aboient, ils sont derrière la clôture, ça va, j’avance à pas prudent.
Mais voilà que 3 petits chiens de conduite déboulent. Ils ne sont pas agressifs mais ils ameutent un deuxième kangal, qui aboie et vient vers moi, en dehors du parc. Les bergers sont là mais ils ne réagissent pas vraiment et après ma mésaventure au Pic de Charance (2316m), je suis échaudé. J’avise un panneau signalétique qui indique un sentier à gauche et je le prends immédiatement sans même savoir ce qu’il indique. Ma seule idée : m’éloigner au plus vite.
Quelques mètres plus loin, je jette un œil à la carte. Pour faire la boucle comme je l’entends, pas le choix, il faut que je bifurque à droite pour suivre le torrent de Clausis. Je ne vais pas laisser ces chiens et ma crainte gâcher mon plaisir et je remonte donc le torrent en rive droite, alors que les aboiements continuent derrière moi.
Après 5 minutes, j’aperçois les deux bergers qui montent par le sentier avec 2 ânes et les 3 chiens de conduite. Je les rattrape et nous discutons cordialement du problème chiens-loups-randonneurs. Dur de trouver une solution qui satisfasse tout le monde, eux-mêmes disant regretter d’avoir dû prendre des chiens de protection depuis 3 ans.
Bref, après ce début de journée un peu agité, je retrouve le calme et la solitude en arrivant au petit lac de Clausis, qui dort encore dans l’ombre. Quelques marmottes sortent furtivement de leur terrier alors que je traverse le grand plateau qui succède au lac. C’est aussi là que je retrouve la Tête de Rissance que nous avions gravie avec Mick à l’hiver, par son versant ubayen.
Je quitte le sentier pour suivre le Ravin de Clausis qui fait un coude à gauche. Avec ce passage relativement étroit sous les parois nord du Péouvou. ça devient vraiment grandiose et sauvage. Peu à peu, la végétation rase laisse place aux roches et quelques névés apparaissent. Des cairns indiquent la voie pour monter au col des Ugousses mais je vais devoir contourner un névé et monter droit dans un terrain à la fois croulant et ramolli par la neige, où les pieds s’enfoncent de plusieurs centimètres.
Au col, que ce soit sur la face est du Péouvou, l’Ubaye ou vers le nord, la vue est déjà sublime. Droit devant, le sommet en impose avec sa silhouette sombre et lugubre.
J’avais en mémoire que Rapha indiquait dans son topo un contournement de l’arête subsommitale par le versant ubayen mais, peut-être grisé par ma récente initiation grimpe avec Mick, je décide de tenter l’aventure et de rester sur l’arête. Parvenu au sommet du premier ressaut (II+), je comprends aisément que c’est une mauvaise idée de poursuivre puisque la descente de l’autre côté est très exposée et que d’autres ressauts du même acabit succèdent à ce premier.
J’effectue donc la traversée en dévers, comme il se doit, et parvient ainsi au pied de la voie qui mène au sommet. L’entrée en matière est intimidante mais la progression finalement plus évidente qu’il n’y parait. En y regardant de plus près, cette Roche Noire n’est pas 100% anthracite, elle a aussi de belles veines pourpres ou vertes.
La récompense est au rendez-vous au sommet avec entre autres le Viso qui apparait presque au dernier moment, majestueux. Et tout en bas, je devine mon point de départ dans la vallée du Cristillan. Je ne suis pas pressé de redescendre et profite un bon moment de ce belvédère privilégié. Avec de tels points de vue, pour un bref instant, on peut avoir la sensation d’être un oiseau.
Pour éviter de trop progresser dans la neige, qui aime jouer des tours dans ce type de terrain rocheux, je ne descends pas par le couloir de Rapha mais reviens un peu vers le col des Ugousses avant de choisir un petit couloir aussi croulant et mou que celui pris pour monter.
Le reste de la progression se fait dans un dédale de blocs instables et très colorés : blanc, noir, ocre, vert, orange, violet, rose... les tonalités sont dans l’ensemble assez ternes, on est pas sur du fluo bien sûr, mais j’ai rarement vu autant de diversité sur une si petite surface.
Je prends mon temps pour descendre en essayant de trouver des passages pour y aller en ramasse et ainsi économiser mes genoux.
Brusquement, la végétation revient et je rejoins le vallon du Cristillan en jetant de nombreux coup d’œil au sommet dans mon dos.
Sur le chemin du retour, sachant que celui-ci passe à proximité de la bergerie de Bois Noir, je ne peux m’empêcher de repenser au matin et je suis inévitablement tendu. Heureusement, pas de nouvelle rencontre désagréable à déplorer et in fine, une nouvelle très belle journée.
Photos
Auteur : Peyuko
Avis et commentaires
Merci à vous deux pour votre vigilance et les corrections !
Merci hereme, j’avais corrigé le texte et pensais avoir fait de même pour les photos...
#54-55-56 : v’la t’y pas que le Cristillan est devenu cristallin !
Merci Cyril. Et merci de compléter mes lacunes en sommets, je vais essayer de retenir mais ce sont des terres encore inconnues pour moi !
Ouaouh ! magnifiques photos et très belle ascension que cette Roche Noire, bravo ! J’adore la photo 42, avec l’aiguille de Scolette, la Dent Parrachée et le Dôme de l’Arpont en enfilade.
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