Sortie du 12 août 2018 par bibox Pic Nord de la Font Sancte (3385m)
Le point culminant du Queyras est accessible par un raide couloir, sans neige au mois d'août, que l'on observe fasciné dès le départ. Randonnée alpine s'il en est, il faudra se méfier des chutes de pierres potentiellement provoquées par des grimpeurs au dessus et faire attention à ceux qui montent en dessous. Tout de même peu de monde en général vers ce sommet difficile et majuscule.
Itinéraire, carte // Fiche topo
Topo de référence
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Conditions météo
Beau temps, peu de vent. Dommage pour les nuages bouchant la vue sur le Mont Viso et l’Italie mais large sinon jusqu’au Dévoluy à l’ouest.
Récit de la sortie
Arrivée en famille pour une bonne semaine de vacances dans le Queyras, la météo s’annonce de suite mitigée, excepté le dimanche, lendemain de notre installation au camping. Il ne faut pas tergiverser et on saisit le créneau. J’ai fait une liste de sommets à faire dans le massif et si je ne devais en faire qu’un, lequel dois-je choisir ? Ce sera le Pic Nord de la Font Sancte, point culminant de la région, du haut de ces 3385m. L’occasion d’élever mon petit record actuel.
Mais ce n’est pas qu’une question d’altitude. Son parcours alpin à travers la remontée de son couloir d’accès me fascine depuis longtemps. C’est pour moi une forme de progression naturelle dans le choix de mes randonnées, seulement un an après m’être mis passionnément à la montagne.
Déjà loin derrière est la sensation de vertige que j’avais éprouvée en longeant les falaises du Grand Veymont dans le Vercors. Je me sens à l’aise sur de nombreux terrains. Mes pieds sont toujours plus sûrs, mes bâtons frappent en rythme, mon sens de l’itinéraire plus précis et j’arrive à prendre en compte un bon nombre de paramètres auxquels je n’aurais pas songé avant.
La montagne est parfois démystifiée par notre génération qui grimpe en courant, en chaussures de trail, vers les sommets. J’ai observé des étudiants, par exemple, grimpant vers des montagnes qui m’impressionnaient tel l’Arcalod, dans les Bauges, comme on se balade dans un parc ou au bord de la Seine, restant simplement cinq minutes en haut, jetant un coup d’œil et redescendant de suite.
Oui, après tout la Font Sancte, sans la neige et sans être obligé de chausser des crampons, ça se fait bien. Même si on évolue hors sentier et en pentes raides, il suffit de marcher, monter, pousser sur les jambes, monter encore, s’arracher et on est arrivé ! On peut glisser dans le couloir ; on ne se tuera pas. Facile.
Mais voilà, il faut penser que dans ce dernier, il vaut mieux avancer sur la gauche pour éviter de se trouver sous les falaises du Pic Sud exposées au chutes de pierres. Grimper dans des blocs et des pierriers à 40° n’est pas une mince affaire.
Il faut être concentré pour ne pas glisser justement car sinon on fait un pas en avant pour deux en arrière. Certains ont le pas plus lourd que d’autres et envoient des parpaings réguliers dans les pentes. On a pris les dalles sur la gauche pour une grimpette qui se fait bien par temps sec mais où il ne faut pas faire n’importe quoi non plus.
Il vaut mieux se lever tôt et essayer d’être les premiers. Dans le milieu du couloir, on a du attendre et faire une pause afin de laisser progresser les trois randonneurs devant nous vers le sommet et être à l’abri des cailloux volants dans notre propre montée.
Celle-ci est physique. Avec mon père qui m’accompagne ou que j’accompagne vu qu’il me fait confiance, on a plutôt la forme. En haut, on a rejoint un vieux monsieur bien plus lent. Question d’expérience. Notre corps est un métronome qu’il faut savoir écouter.
Impossible de ne pas rester au minimum une heure au sommet. On va déjeuner. Puis mince, c’est le Pic Nord de la Font Sancte ! On est au sommet à 3385 mètres ! On s’embrasse pour se congratuler mais surtout parce que on est heureux d’être là.
C’est aérien. Les falaises plongent sur le Lac Saint-Anne, mille mètres plus bas. On est face aux Ecrins, du Vieux Chaillol jusqu’aux Agneaux. Je distingue le Dévoluy, Pic de Bure, Grand Ferrand et Obiou en tête. On observe le Queyras dans sa totalité devant les Aiguilles d’Arves au lointain et les hauts sommets des Cerces. Et le sud. Encore un autre monde passé le col de Vars vers le massif incroyablement esthétique de Chambeyron et son Brec, la Meyna, le début du Mercantour et le massif des Trois-Evêchés. Sans oublier le vertical Pic Sud, 14 mètres plus bas seulement, semblant indiquer telle l’aiguille inversée d’une boussole, le pôle qui lui donne son nom.
Il est déjà temps de descendre le couloir qui s’avérera bien moins compliqué dans ce sens du moment que l’on accepte d’user nos chaussures en s’enfonçant pour mieux dévaler la pente dans les pierriers et après s’être assuré que personne ne se trouvait sous notre trajectoire. De vrais éléphants et les pierres roulent.
Le Val d’Escreins est une splendeur ensoleillée en cet après-midi. Un archétype du Queyras alors que l’on traverse les filtres à lumière que sont les pins et les mélèzes. Le sentier descend tranquillement et je n’ai pas vu passer les kilomètres restant.
Alors est-ce que c’était facile ou non ? Un peu des deux. On est monté rapidement au sommet, en 4 heures et des brouettes. Faire 20 kilomètres pour plus de 1600m de dénivelé positif ne m’a pas paru trop dur ce jour là. Nous étions cinq sur le Pic et j’aurais préféré que nous ne soyons que deux. Peut-être aussi que c’est moi finalement qui démystifie un peu mes pérégrinations montagnardes à force d’expérience. La montagne comme la plupart des choses de ce monde, est un processus auquel on s’adapte.
L’inconnu peut faire peur. En haut, j’anticipais un peu la descente puis celle-ci passée, je l’ai trouvée plus aisée. Mais je ne le savais pas complètement avant. Là est l’éternelle question de savoir quelles sont les limites.
La Font Sancte c’est quand même quelque chose ! Fantastique.
Si tout est dans le rythme, reste la magie de la contemplation. J’ai hâte de planifier mes prochaines aventures.
Photos
Auteur : bibox
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