Trek dans les Encantats

Les Encantats (les Enchantés) est une vaste zone protégée et un parc national situé en Catalogne, le parc National d’Aigüestortes.
C’est un massif granitique où l’on recense environ 500 lacs ce qui est une concentration unique dans les Pyrénées, mais aussi en Europe.

C’est un véritable éden lacustre, mais pas seulement car les sommets à gravir sont nombreux, et il y a quatre beaux "3000". Les Encantats c’est aussi une flore diversifiée : bouleaux, chênes, hêtres à l’étage montagnard, et, à l’étage subalpin, pins sylvestres, pins à crochets et sapins montant jusqu’à 2500 mètres. Vous découvrirez aussi une faune variée : marmottes, isards, sangliers, chevreuils, grands tétras, lagopèdes, pics noirs, aigles royaux, vautours fauves, gypaètes barbus, perdrix, chocards. C’est le paradis pour les randonneurs car chacun y trouve son compte, que l’on veuille uniquement faire un circuit des lacs ou gravir des cimes ou faire les deux comme nous l’avons fait sur 6 jours.

Les 9 refuges qui se trouvent dans les Encantats permettent de randonner en itinérance ou en étoile. Pour nous ce fut à la fois des circuits autour des lacs et des ascensions parmi les isards, et 5 nuits dans 2 refuges. Il existe même un circuit nommé "La Carros de Foc" qui relie les 9 refuges sur 55 km, avec 9200m de dénivelé cumulé, faisable entre 5 et 7 jours. Le balisage est parfait , mais ce qui rend ce lieu unique, c’est aussi de pouvoir sortir des sentiers battus pour se retrouver seul au monde.

• Difficulté : difficile
• Type d’itinéraire : boucle
• Voir la carte de l’itinéraire

• Départ : village d’Arties, dans le val d’Aran

Attention à l’estimation du temps de marche. Il faut bien prendre en compte le fait que vos sacs seront bien chargés.

Jour 1 : Pont de Ressec- Refuge Restanca- Pic de Tossau de Mar (2750m) et retour par les lacs

• 8 heures
• 1650 mètres de dénivelé positif,
• 1300 mètres de dénivelé négatif
• 19 kilomètres

Normalement le départ démarre au pont de Ressec, mais de juillet à Septembre, il faut prendre une navette à partir d’Arties. L’avantage, car même si c’est payant, soyons positifs, est que la navette va jusqu’au pontet de Rius, donc 250m de dénivelé en moins pour atteindre le refuge de la Restanca. Un seul et unique sentier balisé en jaune et des cairns, donc impossible de se tromper. On se déleste au refuge, et comme nous sommes en forme, on se dit qu’on va aller rendre visite au lac Deth Cap Deth Port, en empruntant le GR11.

Première petite pause friandises, puis comme on a un vaste programme, on ne perd pas de temps. On fait quand même une tentative de baignade, mais l’eau est trop froide. Retour vers le lac de la Restanca, et les choses sérieuses commencent car ça grimpe dur, mais qu’importe le spectacle est là. Le lac de Mar est tout simplement fabuleux, et ce n’est qu’un début. Une partie du groupe décide de continuer vers les autres lacs, mais quant à moi, je file vers le sommet du Tossau de Mar, avec 2 de mes compagnons. La vue est sensationnelle, notamment sur tous les lacs de Rius.

L’intérêt des Encantats est de pouvoir gravir des sommets, mais aussi de les éviter pour ne flâner qu’au bord des lacs, et ainsi tout le monde y trouve son bonheur. Nous entamons la boucle pour le retour par les lacs de Rius. L’orage gronde, le ciel se couvre et c’est sous la pluie qu’on revient au refuge. Jamais une douche chaude n’a été aussi appréciable. Déjà plein de photos et de belles sensations, notamment lors de la descente du Tossau de Mar, par un couloir réservé aux isards ! On a commencé fort avec une belle randonnée de 8h.

Jour 2 : Liaison Refuge de la Restanca, au refuge Ventosa I Calvell, par le col de Tumeneia

• 3 heures 30
• 800 mètres de dénivelé positif,
• 500 mètres de dénivelé négatif
• 6,5 kilomètres

Nous quittons le refuge de la Restanca aussitôt après le petit déjeuner pour nous diriger vers le col de Tumeneia, qui nous permettra de basculer sur l’autre versant. Ce coin est beaucoup plus sauvage que par le col de Rius, qui est l’itinéraire classique du GR11, mais en contre-partie, la montée sera plus rude. Bon il faut dire que la pente est de 46% en moyenne sur 550m et régulièrement on oscille entre 25 et 40% ! Il faut être à l’aise dans les pierriers et surtout aimer faire du "saute-mouton" sur de gros blocs."

Du col, nous voyons le Tossau de Mar, gravi hier, et il a fier allure d’ici. L’orage a éclaté, et nous sommes descendus en direction de l’estany de Tumeneia, puis de l’estany de Travessani. NB : Estany veut dire étang en catalan, bon en fait c’est plus simple de dire lac. Miracle, le soleil est revenu et séchage et pique-nique au bord du lac de Travessani, proche du refuge de Ventosa.

On en profite pour se reposer d’autant que la météo est imprévisible, donc l’ascension du Tuc des Monges, attendra demain. Nous ne sommes pas là non plus pour enchaîner des gros dénivelés tous les
jours, et Dame nature nous gâte avec de superbes couleurs qu’offre un ciel orageux. Le refuge est superbe, et le personnel au top. Apéritif sur la terrasse qui surplombe l’estany Negre.

Jour 3 : Refuge Ventosa I Calvell- Tuc des Monges (2699m), et grande boucle des lacs pour le retour au refuge

• 5 heures
• 700 mètres de dénivelé positif,
• 700 mètres de dénivelé négatif
• 8 kilomètres

Depuis le refuge, c’est un sentier agréable qui nous mène au 1er lac, l’Estany Xic (mentionné uniquement sur la carte Alpina Val d’Aran). On arrive ensuite au grand lac, l’estany de Travessani, et nous quittons le sentier balisé, même si parfois, quelques cairns font leur apparition. Nous avons déjà le Tuc des Monges en visuel. On arrive à l’estany des Monges, et au loin nous repérons une dizaine d’isards sur la crête du Tuc des Monges. J’ai réussi à prendre en photo 3 isards avec le lac des Monges en toile de fond, et rien que pour ce cliché, je suis aux anges.

Nous sommes seuls au monde, et cela va nous arriver souvent dès que l’on sort des sentiers battus. Jamais vu autant de lacs dans ce milieu minéral. La crête qui mène au Port de Rius (col) est plaisante et même si certains passages nécessitent de mettre les mains, ça ne pose pas de problème. L’orage est menaçant (encore) la brume s’élève au-dessus des lacs, les nuages jouent à cache cache avec le soleil, c’est féérique. Les lacs s’enchaînent, mais il y aussi plein de vasques naturelles dont l’eau limpide est une incitation à piquer une tête.

Superbe panorama sur l’estany del Port de Caldes, l’estany de Mangades, l’estany des Monges, sur le pic de Montardo, etc.
Pour les amoureux de lacs, c’est pour moi le plus bel endroit de ce secteur. Festin de roi au refuge, jamais le même menu, c’est exceptionnel pour un refuge d’altitude, mais nos amis espagnols savent recevoir.

Jour 4 : Refuge Ventosa - Besiberri Sud (3030m)

• 10 heures
• 1500 mètres de dénivelé positif,
• 1500 mètres de dénivelé négatif
• 15 kilomètres

Ce refuge est idéalement placé et permet de faire des randonnées en étoile, et aujourd’hui c’est une grosse journée qui s’annonce avec l’ascension de notre 1er « 3000 » des Encantats. Sauf que ce n’était pas le Besiberri 3030m, qui était prévu, mais le Comaloforno ! Une tracé peu fiable m’en a écarté, des cairns n’importe où, et je me retrouve sur le massif du Besiberri. La majorité des accès du massif du Besiberri se font par l’autre versant via le col d’Abellers.

La montagne c’est aussi une aventure, c’est aller parfois vers l’inconnu, et c’est exactement ce qui s’est passé cette journée. Le soleil se lève sur l’estany Negre, puis nous descendons dans le vallon de Riumalo, en direction de l’Estany de Cavallers. La rivière serpente à travers les pins à crochets, et les petites cascades agrémentent notre parcours. Nous enjambons le barranco de Riumalo, par la passerelle en bois, puis nous le longeons rive gauche. Le paysage devient plus minéral et carrément austère lorsqu’on arrive au pied du massif du Bessiberi. Seul l’estanyet de Riumalo, égaye un peu l’endroit, grâce à la couleur verte de son eau. Il y a longtemps que je ne m’étais pas trouvé dans un lieu aussi solitaire. Passages en dévers, pierriers de toutes sortes, cheminées, pas de balisages, voilà notre menu du jour.

J’arrange des cairns et j’en met des nouveaux pour nous assurer le retour, sauf que nous ne repasserons pas par là, mais je ne le sais pas encore. Notre souci est la météo qui évolue vers l’orage et le vent qui se lève. Nous sommes à 2 doigts de renoncer, mais arrivé sur la crête, miracle, le temps s’améliore. Le pic de Comaloforno est bien visible mais trop éloigné pour qu’on tente d’y aller.
On opte pour la boucle et nous apercevons en dessous de nous l’Estany de Comaloforno.

Pas de cairns ou très peu, il faut savoir s’orienter, mais que de barres rocheuses ! La progression est lente mais nous arrivons enfin au-dessus du lac, puis on de dirige vers un autre lac sans nom, Est. Il ne faut pas descendre trop bas à cause des barres rocheuses, et enfin on retrouve le sentier de l’aller le long du barranco de Riumalo. On peut enfin souffler, mais nous nous hâtons pour arriver juste à l’heure du dîner. Ce fut une dure journée, et riche en émotion, surtout quand mon GPS a fait des siennes, mais bon j’avais la carte (toujours indispensable dans ces cas).

Jour 5 : Refuge Ventosa- Punta Alta de Comalesbienes (3014m)

• 7 heures 30
• 950 mètres de dénivelé positif,
• 950 mètres de dénivelé négatif
• 8 kilomètres

Après un petit déjeuner bien copieux, nous décidons d’attaquer notre 2^e « 3000 » mais cette fois-ci, pas d’erreur d’aiguillage ! Tout le monde est motivé, d’autant que le dénivelé ne sera pas celui de la veille, et que l’on va découvrir une autre partie des Encantats. Du refuge, une petite descente nous amène à l’estany de Colieto, où les premiers rayons de soleil se reflètent.

Petite balade dans le vallon, au milieu de quelques vaches, mais ensuite il va falloir avoir des jambes car le sentier grimpe sec et c’est parti pour 845m de dénivelé sur seulement 4 km.

On arrive à l’estany de la Roca qui peut être un objectif sympa si on ne veut pas gravir le sommet. On va « manger » du pierrier, mais bon on s’habitue. En restant sur le bord on progresse mieux, puis on s’engage dans une longue cheminée constituée d’éboulis. Un sommet relativement facile, rien à voir avec le Besiberri Sud.

Nous sommes descendus tranquillement en étant resté un bon moment au sommet, à refaire le monde et à pique-niquer avec un jeune couple d’espagnols. Longue pause à l’estany de la Roca où certains d’entre-nous ont fait trempette, mais pas trop longtemps car l’eau était vraiment froide.

Jour 6 : Refuge Ventosa- pic de Travessani (2753m)- Tuc Deth Port (2783m)

• 9 heures 30
• 1200 mètres de dénivelé positif,
• 1400 mètres de dénivelé négatif
• 15 kilomètres

Notre dernier jour, mais nous savons déjà que nous reviendrons et commencerons notre prochain trek, là où nous l’achevons aujourd’hui. Notre objectif est de gravir les 3 sommets dans cet ordre : Pic de Travessani, pic Nord de Travessani, et Tuc Deth Port, appelé aussi Tuc del Port de Caldes, depuis le refuge de Ventosa I Calvell.

Le retour se fera par le refuge de Colomers. Du refuge, on se dirige Est sur le sentier balisé mais qu’on quitte rapidement vers 2220m en prenant une sente sur la gauche Nord-Est. Au début il suffit de suivre quelques cairns, mais ensuite plus rien et il faut s’attaquer à une pente herbeuse très raide, dont le pourcentage moyen est de 39% . On se trouve juste derrière les Aiguilles de Travessani, et on se croirait presque dans les Alpes. En fait le pic de Travessani fait suite aux Aiguilles.

On arrive au pied d’une cheminée où il faut mettre les mains, puis on accède à la crête, et le pic se trouve sur la gauche. Ensuite on poursuit la crête Nord-Est, Est en direction du pic Nord de Travessani. Aucune difficulté pour le rejoindre. Ensuite orientation Nord jusqu’au col de Travessani, qui se trouve au pied du Tuc Deth Port ( Tuc del Port de Caldes). La pente qui se présente à nous est raide, mais sans difficulté par temps sec. Cap plein Nord. Très beau panorama à 360° sur tous les lacs alentour. Impossible de tous les répertorier.

On revient au col puis on bascule dans l’autre vallon, coté Colomers, toujours Nord, pour rejoindre le Port de Caldes, appelé aussi Port de Colomers. Pour éviter de descendre trop bas, on est resté à flanc pour trouver un passage dans un collet puis une descente facile dans un pierrier et enfin on accède au col.

Normalement de ce col, nous aurions du nous diriger vers le col de Rius, pour rejoindre le refuge de la Restanca, puis le pont de Ressec, afin déterminer notre boucle. Des amis nous ayant rejoint, nous sommes descendus vers le refuge de Colomers, puis avons pris une navette qui amène au parking où ils étaient garés. Là encore, le décor est somptueux et l’année prochaine le départ se fera de ce coté des Encantats, le secteur de Colomers. Sur ces 6 jours, il y en aura eu pour tous les goûts. Balade sympa avec les circuits autour des lacs, un sommet facile comme le Tuc des Monges, mais aussi des sommets qui se méritent avec la plus grosse difficulté concernant le Besiberri Sud.

Infos pratiques

La meilleure période pour les Encantats est de Juin à fin Septembre. Durant cette saison pas d’équipement spécifique, et au contraire, on randonne léger.
Camping et bivouac sont interdits, donc amener un sac à viande et quelques affaires de rechange. On peut facilement laver ses affaires et ça sèche vite en Espagne. La 1ère quinzaine d’octobre est envisageable mais il faut se renseigner au près des refuges car certains sont déjà fermés et d’autres peuvent rester ouverts plus longtemps.

Tous ces refuges sont à réserver sur ce site :
refusonline.com/fr/carte-...

L’équipe

C’est avec une partie de mon groupe d’amis habituels, qui m’accompagnent régulièrement en montagne, que nous avons effectué ce périple dans les Encantats. Merci à ma femme Véronique, et mes amis Nad, Jeanine, Marie- Pierre, Cathy, Claudio, Jean, et Jérôme d’avoir partagé tous ces moments de pur bonheur.
J’ai aussi une pensée à ceux qui n’ont pas pu venir, mais qui viendront peut-être en 2023, pour la suite, car notre périple dans les Encantats est loin d’être terminé.

Auteur : o2rando