Sortie du 19 juin 2021 par bibox Grande Sure (1920m) par le Col de la Grande Vache et le Goulet d’Hurtières
La Grande Sure est le sommet de notre famille. Toutes les générations que je connais y sont allées. La montagne que l'on voudrait garder si il ne devait en rester qu'une. Et cette première fois pour mon fils était évidement symbolique et un objectif incontournable pour cette année. Le beau temps était au rendez-vous pour pique-niquer dans l'alpage avant de vaincre le sommet. Une date dont on pourra se rappeler.
Itinéraire, carte // Fiche topo
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Conditions météo
Ciel voilé mais beau. Fort vent du sud.
Récit de la sortie
Il faut se motiver à se coucher tôt un vendredi soir après une semaine d’école pour avoir la foi de se lever le samedi matin et prendre la route du col de la Charmette à 7 heures. Le week-end s’annonçait orageux mais le premier jour des deux permet finalement une belle fenêtre de sortie que j’aurais regretté d’avoir manquée. Donc gloire aux montagnes, on y va, avec mon fils de 7 ans !
Le parking est encore loin d’être rempli lorsque l’on se gare à 1261m d’altitude. L’accès au terre-plein du Chalet étant barré par l’arrivée de plusieurs camions-remorques transportant... des vaches. Rien que d’être là, au départ de la randonnée, me donne une bouffée de bonheur dans cet environnement toujours dépaysant alors que les promeneurs s’affairent autour des enclos maintenant occupés par les meuh-meuh. Ah les bâtisses de montagnes, la végétation et ses fleurs du mois de juin, les reliefs avec les nombreuses perspectives verticales ou horizontales qu’ils permettent. Et les panneaux jaunes, le nôtre indiquant déjà 3,3 kilomètres pour 1h40 de marche jusqu’au col de la Sure.
Je mets encore aujourd’hui en pratique ma théorie du dénivelé en fonction de l’âge. À savoir, 7 ans = 700m de dénivelé au moins une fois dans l’année, 8 ans = 800m, 9 ans = 900m à faire etc... cette équation vaudra jusqu’à atteindre ses 20 ans. Je ne l’applique pas à moi-même alors que les poils blancs sont maintenant légion dans ma barbe de printemps, n’est-ce pas, 3700m feraient beaucoup, n’est-il pas, n’est-ce pas. Le petit Samuel va pour sa part amplement relever le défi et plus encore, avec même de la marge physiquement à l’arrivée ! Après calculs, lors de cette sortie, on aura effectué 10km de marche pour environ 750m+ avalés. Beaux gosses.
Le premier sentier qui nous permet d’atteindre le col de la Grande Vache à travers la forêt de Génieux est bien plus agréable que dans mes souvenirs. Oui la piste carrossable au départ mais ensuite c’est loin d’être vilain. La nature est des plus luxuriante, les fougères nombreuses et d’un vert exaltant. Une petite grotte-tunnel attire notre curiosité à la suite d’un premier raidillon qui nous met dans le rythme. Notre allure est régulière, enfin, car les sorties précédentes alternaient entre portions réalisées au sprint et d’autres à pas de sénateur. La conversation s’engage bon train avec pour sujet l’univers Pokémon. Conversation qui va nous permettre de gagner l’étage subalpin du col sans quasiment s’en rendre compte ! Je remarque que mon fils arrive à parler en continu malgré les pentes parfois plus raides, dans une bonne respiration alors que j’ai moi plus besoin de chercher mon souffle. C’est pour cette raison que après une pause, je lui fais essayer de porter le sac d’environ 5 kilos l’espace d’une minute. C’est rigolo, il veut porter plus longtemps mais je ne vais pas lui faire mal au dos donc je le reprends rapidement.
L’environnement se découvre des arbres et la vue s’étend sur les sommets emblématiques du sud du massif, dont son point culminant qu’est Chamechaude. À 1712m d’altitude, nous franchissons le portail ouvert de l’alpage au col de la Grande Vache. C’est ici que la randonnée prend tout son sens car la cime de la Grande Sure que l’on a maintenant en face, n’est pas un sommet ordinaire pour nous et ce n’est pas un hasard que nous soyons là. Cette Sure, la grande de Chartreuse, est le sommet de cœur de notre famille, celui sur lequel 4 générations de bibis, de Billon-Grand, sont maintenant venus ; 4 générations toujours bien vivantes aujourd’hui. C’était très symbolique pour moi d’emmener mon fils faire sa première Grande Sure. La cime qui domine de toute la hauteur de son versant ouest, le chalet de mes grands-parents, au-dessus du village de Saint-Joseph-de-Rivière. Mes souvenirs d’enfance me reviennent face à cette cime immuable où je retrouve la zone terreuse et creusée du col de la Sure, position d’un de mes premiers pique-niques en montagne.
Le vent est fort, envoie valser ma casquette à une dizaine de mètres et l’on grimpe les premières pentes raides du bastion sommital pour trouver abri derrière un conifère, à côté des rhododendrons, pour notre collation assez anticipée, à peine 10h15 passée. Chips, jambon-beurre-emmental, pommes, crêpes chimiques au chocolat, voilà le menu. Notre regard embrasse tout l’alpage du passage du Cul de Lampe (!...) au col d’Hurtières dominé par le Rocher de Lorzier, théâtre de ma dernière itinérance en ces lieux. Au loin, point de Mont Blanc à cause de la purée de pois. Le Grand Som est un bateau fantôme dans les brumes et il faut deviner les contours du Mont Granier.
Après la collation, le petit repart dans les lacets frais comme un gardon, à fond. Bon bah le pus dur est passé, il ne reste plus qu’à traverser vers la butte sommitale, au plus près du ciel bleu, dans un décor aérien, sans être exposé. Avant d’atteindre la croix, un premier névé se présente. Impossible de faire du toboggan dessus car le bas de celui-ci présente une cassure et un finish sur des rochers. C’est le moment de s’encorder en tour de taille avec la corde de 5m. Pas de baudriers, un simple triple nœud suffit. Me voilà rassuré pour assurer l’arrivée au sommet en toute tranquillité. C’est gagné, on y est, punaise c’est bon ! Un monsieur félicite Samuel alors que l’on aura pas croisé d’autres enfants de son âge, ainsi que ensuite en redescendant. Je tire sur la laisse alors qu’il engage un pas derrière la croix. On avance de concert le long de l’arête sud pour se poser au niveau où débouche la voie de la cheminée de Jusson. Le chalet familial est bien visible 1300m plus bas, sur une colline jurassienne. Notre maison, bien plus lointaine dans la plaine de la Bièvre, est par contre sous les nuages bas, de ce côté-là.
Puis on quitte le sommet de nouveau en longeant, toujours encordés, la crête en direction du nord. Le parterre est jonché de gentianes, de globulaires, de pensées, de dryades, narcisses et autres trolles. Dans un creux, un second névé nous permet une remontée facile de ce dernier et pour le fun encore attachés, comme sur un glacier ! Je nous libère de notre chaine pour laisser l’enfant s’éclater 15min sur la neige, multiplier glissades et roulades. Avec tout le temps du monde, nous retrouvons le sentier pour le col de la Sure. Ce coup-ci, nous prenons l’alternative du dessous, pourtant barrée par une croix jaune mais qui était le sentier principal quand j’étais plus jeune. Une belle dalle relevée, on pose les affaires pour s’entrainer à l’escalade facile en quelques longueurs. De retour dans l’alpage, l’entente est joyeuse, détendue avec les personnes qui comme nous en ont terminées.
Je me revois enfant, en avoir déjà plein les pieds après une telle montée. Pourtant, ici j’impose mon envie de faire un léger détour et faire la boucle par le goulet d’Hurtières. Pas de problèmes pour le petit garçon. Riche idée pour profiter des lieux sans avoir d’autres objectifs que d’étirer le moment en faisant le plein d’images. Les meuh-meuh, les vaches ont quitté leurs enclos et nous ont rejoint. Samuel est fasciné mais aussi très intimidé. C’est gros une vache en liberté dans les prés. Ça regarde mauvais un taureau quand on s’approche de trop près. Bucolique car je crois que l’on travaille assez toute l’année pour pouvoir apprécier dans toute son ampleur cet alpage d’Hurtières qui sent bon les vacances et qui se prête complètement à un repos mérité, déstressé. Le stress vite fait quand même dans un virage du goulet, au bord d’un précipice où il faut rester concentré avec les enfants, sans relâcher une vigilance que notre flânerie de l’après-midi pourrait facilement nous faire oublier.
Des pipis après le franchissement, un gros caca dans le bois, histoire de marquer notre territoire. Sans transition nous voilà sur un sentier encore plus joli et forestier qu’à l’aller. On joue vite fait à la guerre avec nos bâtons, mais pour de faux et avec des balles imaginaires de peinture car la guerre, faut dire ce qui est, c’est nul... Ce qui ne l’est pas, c’est la lumière qui filtre entre les branches et les épines des hauts sapins effilés, lumière qui vient éclairer souches d’arbres, gouilles d’eau, tapis de fleurs et de fougères, troncs renversés et arches naturelles. Les oiseaux chantent, régnant sur la canopée. Le chemin nous donne la sensation parfois de nous promener selon la volonté de l’âme de la forêt comme si il pouvait être différent pour chacun des passants, toujours changeant, s’enfonçant régulièrement dans des recoins merveilleux. Avant de finir par une longue traversée, à plat, jolie certes mais moins confidentielle pour retrouver le parking du Chalet de la Charmette. Les enclos sont vides, on sait où sont parties les vaches.
Pour terminer, Samuel insiste pour remonter jusqu’à la petite grotte qui nous avait intéressée au début de la journée. Quoi ! Sérieusement ? La voiture est juste là... On remonte sans que je me rappelle exactement où elle était située. À mi-pente du premier raidillon, en fait j’ai plus la foi, ça fait longtemps que je n’avais pas marché autant et c’est moi donc qui décide de rebrousser chemin. Le fils me lance que à 10 ans, il devra m’attendre dans les montées. Je mise plus sur ses 12 ans, que je lui réponds. C’est vrai que la sensation fut incroyable de cheminer à ses côtés en cette mi-juin, quelques semaines après avoir fêté ses 7 ans. Il n’a jamais bronché ; jamais il n’a semblé dans le dur ou essoufflé, évoluant avec l’impression qu’il en avait encore dans le moteur. Une sensation étrange, comme si il avait été au-dessus, détaché de ce que nous, les autres êtres sujets à la fatigue, ressentons. C’était surement une fausse impression de ma part ajoutée à la fraicheur de l’enfance. Mais quand je lui ai demandé, à la fin, il m’a dit qu’il n’était pas fatigué...
Mystère, en attendant d’autres journées. La Grande Sure, c’est fait ! Il fallait le voir pour le croire. Il doit avoir le cœur de sa mère. Même si il m’énerve ponctuellement on va dire, je suis tellement fier de lui. Et je ne suis pas le seul.
Photos
Auteur : bibox
Avis et commentaires
Félicitations ! Ce sont des moments de partages inoubliables !! Je comprend facilement votre fierté, et je suis sûr que lui aussi est fier de son papa.
Amitié.
Pareil pour ma fille de 7 ans ...elle monte en discutant sans être essoufflée. Elle continue a courir après 700m de dénivelé positif...elle n est pas pressée d’aller se coucher le soir. Bref infatigable (du moins en apparence car évidemment nous restons dans des sorties raisonnables pour son âge). Pourvu que la randonnée continue a leur plaire en grandissant !
Quelle belle expérience....ça fait plaisir de lire vos déambulations familiales, voilà un petit qui promet !
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